Encore une fois, le Canada semble faire cavalier seul parmi les économies avancées.

La création d'emplois y a bondi en mars alors qu'elle paraît s'essouffler aux États-Unis. Les entreprises affichent un regain d'optimisme, selon l'enquête trimestrielle de la Banque du Canada.

À un point tel que ses perspectives de croissance sont révisées à la hausse par les prévisionnistes des institutions financières, ce qui entraîne aussi de meilleurs pronostics pour la plupart de ses régions.

Ainsi, la TD, qui a fait passer de 1,7% à 2,2% son scénario d'expansion réelle pour le Canada il y a quelques jours, prédit désormais que l'avancée de l'économie québécoise sera de 2,0% cette année et de 2,2% l'an prochain. En décembre, alors que les mauvaises nouvelles s'accumulaient au chapitre de l'emploi de même que sur la scène internationale, elle voyait plutôt 1,4% et 2,0% respectivement.

«Si la prévision de croissance pour le Québec reste sous la moyenne canadienne, c'est en bonne partie en raison de sa faible création d'emplois et d'un ralentissement probable du marché de l'habitation», estime toutefois Jacques Marcil, économiste principal de l'institution de la Ville reine.

Il s'attend à ce que le taux de chômage moyen soit de 8,0% cette année avant de descendre à 7,6% en moyenne l'an prochain.

L'an dernier, le taux des demandeurs d'emploi avait été de 7,7% en moyenne, grâce surtout au premier semestre, plus fécond que le second en matière d'emplois.

Si cette prévision s'avère, alors le taux de chômage du Québec sera plus élevé que celui de l'Ontario pour la première fois en quatre ans.

Le mois dernier, c'était déjà le cas avec des taux respectifs de 7,9% et de 7,4%, selon les données de Statistique Canada.

En 2012 et 2013, le nombre de mises en chantier devrait poursuivre son mouvement de recul amorcé l'an dernier: les nouvelles coulées de béton seront limitées à 46 500 et 42 300 tandis que le nombre de transactions sur le marché de la revente reculera à 76 800 et 73 300. «C'est le signe d'une érosion de l'accès à la propriété», estime M. Marcil.

À la différence d'autres provinces, l'Ontario en particulier, le retour à l'équilibre budgétaire projeté par Québec n'entravera pas trop la croissance. En revanche, les coupes annoncées par le gouvernement fédéral vont sûrement mordre dans l'activité économique de la région de Gatineau.

La TD révise aussi fortement à la hausse la valeur de la production de biens et services pour cette année. La variation du produit intérieur brut (PIB) nominal du Québec sera de 4,4% et de 3,9% en 2012 et 2013. En décembre, elle voyait plutôt 2,1% et 3,7%.

La nouvelle projection est plus élevée que celle retenue par le ministre des Finances, Raymond Bachand. Dans son budget du 20 mars, il fondait ses prévisions de recettes fiscales sur une croissance du PIB nominal de 3,8% et de 4,1%. Cela lui semblait suffisant pour permettre le retour à l'équilibre budgétaire en 2013-3014. (Le PIB nominal est une mesure commode de l'assiette fiscale.)

L'optimisme relatif affiché par les prévisions de la TD pour le Canada et ses provinces détonne quelque peu par rapport à la maussaderie des marchés boursiers affichée cette semaine.

De vieux démons se raniment

Le marché du travail américain perd de son tonus alors que la première économie du monde compte toujours 12,6 millions de chômeurs. C'est ce qui explique que le taux des obligations de 10 ans est repassé sous la barre des 2%, hier.

Le feuilleton de la crise de la dette souveraine européenne amorce un nouvel épisode qui se déroule dans la péninsule ibérique cette fois-ci. Tant le Portugal que l'Espagne éprouvent des difficultés à concrétiser le redressement de leurs finances publiques.

Cela dit, M. Marcil voit les choses un peu comme la Banque du Canada qui devrait à son tour relever sa prévision de croissance pour l'année en cours, la semaine prochaine: «Même si l'incertitude mondiale demeure anormalement élevée, l'endettement des ménages est devenu le risque le plus important auquel sont confrontées les économies provinciales.»

Mince consolation, l'Ontario, la Saskatchewan, l'Alberta et la Colombie-Britannique seraient plus vulnérables que le Québec à ce chapitre.