La biotech de Québec AEterna Zentaris (T.AEZ) a indiqué hier matin que son produit phare avait raté la cible. La perifosine, un médicament qu'on évaluait pour sa capacité à prolonger la vie de patients atteints d'un cancer du côlon, n'a pu faire mieux que le placebo dans le cadre de l'étude clinique ultime.

Cette annonce a eu un effet majeur sur le titre de l'entreprise, qui a reculé de 67% hier à la Bourse de Toronto. Il a glissé de 2,14$ à 71 cents.

«C'est avec grande déception qu'on a vu ces résultats-là en fin de semaine, a expliqué en entrevue téléphonique à La Presse Affaires Dennis Turpin, chef de la direction financière d'AEterna. Pour nous, c'était un grand projet avec une occasion extraordinaire dans le cancer du côlon. Malheureusement, on n'a pas été capables d'augmenter la survie des patients.»

L'étude de phase III représente l'ultime étape que doit traverser un médicament avant d'être approuvé par la Food and Drug Administration (FDA), puis commercialisé en territoire américain. C'est là que la perifosine a échoué. Dans une étude à laquelle ont participé 468 patients atteints d'un cancer du côlon en phase terminale, le produit phare d'AEterna n'a pu augmenter la durée de vie par rapport au placebo.

L'objectif était de prolonger la vie des patients d'au moins deux mois.

AEterna avait fondé beaucoup d'espoir dans ce médicament. L'entreprise menait même des études de phase II pour ce médicament dans le traitement du cancer colorectal métastatique avancé et du cancer du rein. Selon Dennis Turpin, l'entreprise devra maintenant s'asseoir avec ses partenaires pour discuter de l'avenir de ces études.

«On est une entreprise avec beaucoup de résilience, et malgré le recul d'aujourd'hui, on va être en mesure de se replacer, a indiqué Dennis Turpin. C'est le lot du domaine. Il y a toujours un risque important, surtout lorsqu'on développe en oncologie.»

De la résilience, AEterna en a probablement, tout comme ses actionnaires. Pour l'entreprise de Québec, c'est le deuxième échec consécutif en étude clinique de phase III. En 2009, le cetrorelix, un produit qu'on croyait capable de contrer l'hyperplasie bénigne de la prostate, avait lui aussi atteint l'étape ultime, sans prouver après coup son efficacité.

L'entreprise de Québec se tournera désormais vers les autres produits qu'elle met au point, notamment un test diagnostique pour évaluer les niveaux d'hormone de croissance et une gamme de médicaments contre le cancer à l'étape clinique ou préclinique.

Selon Pooya Hemami, analyste chez Valeurs mobilières Desjardins, la nouvelle d'hier va peser lourdement sur les actions d'AEterna. «Nous avions déjà évalué la valeur de la trésorerie d'AEZ et de son pipeline excluant la perifosine à 1 dollar par action, et nous anticipons que la pression baissière sur le titre pourrait potentiellement l'amener à court terme encore plus bas», a-t-il indiqué dans une notice aux investisseurs.

L'annonce d'hier a également fait baisser le titre de Keryx Biopharmaceuticals au NASDAQ. L'entreprise à laquelle AEterna a cédé les droits de commercialisation de la perifosine sur le territoire nord-américain a vu la valeur de son action plonger de 65%.