L'annonce du paiement d'un dividende signale-t-elle le début d'une nouvelle ère chez Apple? Faut-il y voir un changement d'orientation majeur de la part de la direction, étant donné que Steve Jobs, charismatique président mort en octobre, s'était toujours opposé à une telle distribution?

Cette question était sur les lèvres de nombreux investisseurs hier alors que les dirigeants d'Apple ont annoncé comment ils utiliseront les liquidités de 97 milliards US provenant de la frénésie des dernières années envers les produits de la société.

L'entreprise versera un dividende trimestriel de 2,65$US, ce qui, au cours actuel, équivaut à un rendement annuel de 1,8%. De plus, à partir de son prochain exercice financier qui commencera en septembre, elle rachètera pour 10 milliards US par année de ses propres actions pendant trois ans.

Bien que peu d'entreprises du secteur de la technologie versent un dividende ou rachètent de leurs actions, il ne faut pas y voir un changement considérable chez Apple, explique Susan Da Sie, vice-présidente, actions, chez Investissement Standard Life. «Steve Jobs était un manager extrêmement rigoureux qui a instauré une culture d'entreprise suffisamment forte qu'on ne la changera pas de si tôt», dit-elle.

Apple est une des plus belles entreprises de croissance du monde, et elle continuera de l'être. Les bénéfices d'Apple ont doublé en 2011, et on prévoit une augmentation de 50% en 2012. Pour 2013, les analystes prévoient 15% de croissance des bénéfices. «Mais cette dernière prévision pourrait ultimement s'avérer trop basse», dit Mme Da Sie.

Les bénéfices ne peuvent croître indéfiniment à un rythme de 30% et plus. Mais on peut raisonnablement s'attendre à un taux de croissance de 15-20% durant les prochaines années, croit la gestionnaire de Standard Life.

«Cela permettra au prix de l'action de continuer de grimper», dit-elle. Apple se négocie actuellement à un ratio cours/bénéfices de 13,8 fois les bénéfices escomptés en 2012, ce qui n'est pas plus élevé que la moyenne des titres du S&P 500.

Le bassin d'investisseurs grossit

Cette annonce est intéressante en ce qu'elle permettra à Apple d'élargir sa base d'investisseurs. Plusieurs fonds sont restreints à n'investir que dans les entreprises qui paient des dividendes. Ils pourront maintenant acheter Apple.

Bien qu'Apple ne soit classée que dans le secteur de la technologie, le paiement d'un dividende et le rachat d'actions lui confèrent de plus en plus les attributs d'une entreprise du secteur de la consommation, explique Jean Duguay, directeur des placements chez Eterna, firme de gestion de portefeuilles de Québec.

Tout en offrant les bénéfices et la croissance liés à l'innovation, Apple a maintenant des éléments propres aux titres défensifs. «Cette combinaison continuera de faire d'Apple un des titres boursiers favoris pour quelques années encore», dit-il.

Mais n'est-il pas un peu tard pour acheter?

Depuis quatre mois, le cours de l'action d'Apple a grimpé de 66%. Il est 45% plus élevé que sa moyenne mobile de 200 jours, ce qui signifie que le titre est très en avance sur sa tendance à long terme. S'approche-t-il d'un sommet?

Chose certaine, les gestionnaires qui détiennent le titre auront de la difficulté à se convaincre de le vendre, croit Jean Duguay. «Apple représente un poids important de nos investissements dans le secteur de la technologie et les nouvelles du dividende et des rachats d'actions nous incitent à conserver nos positions», dit-il. Pour ce qui est de ceux qui songent à faire un premier achat du titre, il suggère toutefois d'attendre un peu, car il n'est certainement plus une aubaine à la suite de la hausse rapide des derniers mois. «Il faut plutôt chercher à acheter lorsque des replis se produiront», dit-il.

Au-delà de la hausse rapide du titre, la prudence est aussi de mise étant donné que le rythme auquel Apple innove pourrait bien commencer à ralentir, souligne Stéphan Buu, gestionnaire de portefeuilles chez CTI Capital. «Il serait logique de procéder à des prises de profits sur une partie des titres que vous détenez», dit-il. Mais pas question de tout vendre pour autant, car Apple aura sa place dans tout portefeuille d'actions américaines sûrement pour quelques années encore, selon lui.

Pour en savoir plus sur la Bourse, visitez la série Éducation des investisseurs, rédigée par Jean Gagnon, à l'adresse: https://lapresseaffaires.cyberpresse.ca/portfolio/education-des-investisseurs/