Pendant que les médicaments biologiques gagnent des parts de marché, on prépare dans les coulisses l'arrivée de leurs médicaments substituts, les biosimilaires. Car qui dit médicament d'origine, dit aussi substitut générique. Une règle à laquelle les «biologiques» n'échappent pas, ou enfin, presque.

Car si certains ont l'espoir de voir le prix des médicaments biologiques chuter avec la fin de leur brevet, ils devront se faire une tête: la production des biosimilaires est onéreuse et son prix de vente ne pourra être fixé à 25% du prix d'un médicament d'origine comme on le fait en Ontario et au Québec pour les médicaments conventionnels.

«Les entreprises ont mis du temps à investir le marché parce qu'elles croyaient qu'elles allaient devoir vendre le médicament à 25% du prix du médicament d'origine, explique Pierre Falardeau, président et chef de la direction d'Oncozyme Pharma. L'investissement nécessaire pour développer un biosimilaire n'est pas du tout comparable à celui d'un médicament normal. On peut donc seulement envisager une réduction du coût de 20 à 25% par rapport à l'innovateur.»

Derrière cette prévision se cache le statut particulier qui est accordé aux biosimilaires par les autorités gouvernementales.

«Les biosimilaires, sont approuvés selon les règles des nouveaux médicaments, indique Priscilla Po, directrice des services cliniques chez Express Scripts. En conséquence, on ne peut pas substituer un médicament biologique contre son équivalent biosimilaire.»

En raison de ce statut, les pharmaceutiques désireuses de mettre de l'avant un biosimilaire doivent soumettre leur médicament à des études cliniques. Pour expliquer la situation, il faut comprendre comment sont fabriqués ces médicaments.

Selon Marie-Hélène Rochon, agente de brevets chez Norton Rose, il est impossible de comparer un «biologique» avec son équivalent générique parce que les techniques de fabrication de ces médicaments créent de la variabilité.

«Pour qu'un médicament générique soit approuvé au Canada, il faut démontrer qu'il y a bioéquivalence avec l'original, mais comme un médicament biologique est beaucoup plus complexe, on ne peut pas démontrer sa bioéquivalence, explique-t-elle. On parle plutôt de biosimilarité. L'important, c'est qu'il puisse traiter la même maladie par le même mécanisme.»

Pour l'instant, ce sont principalement les fabricants de médicaments génériques qui investissent le marché. Le deuxième fabricant mondial de médicaments génériques, Sandoz, s'est engagé dans cette voie. L'entreprise a déjà trois biosimilaires sur le marché qui lui ont permis d'enregistrer des ventes de 261 millions de dollars jusqu'ici.

«Le développement de médicaments biosimilaires est plutôt différent si on le compare au médicament générique classique, explique Samuele Butera, vice-président et chef de la biopharmaceutique chez Sandoz. Le développement d'un biosimilaire coûte entre 75 et 250 millions, prend 10 ans, et implique des études cliniques sur approximativement 500 patients. Pour un médicament générique classique, le coût de développement se situe à quelques millions sur une période de deux ou trois années et implique une étude clinique qui implique seulement 20 à 50 participants.»

D'ici 2016, il s'attend à ce que les brevets attachés à des médicaments biologiques d'importance viennent à échéance. Un marché potentiel de 60 milliards de dollars s'ouvrant en conséquence.

Le tabac, futur producteur de médicaments

Nichée à Québec, la biotech Medicago compte elle aussi faire sa place dans le marché des biosimilaires. L'entreprise produit déjà des protéines dans ses plants de tabac pour la préparation de vaccins, et compte se lancer prochainement dans la production de biosimilaires.

Selon Andrew Sheldon, président et chef de la direction de Medicago, son entreprise se positionne avantageusement pour développer un jour des biosimilaires. «On a fait des tests préliminaires et on croit qu'on sera très compétitif», explique-t-il.

«La guerre va se faire sur les prix», explique Andrew Sheldon, président et chef de la direction de Medicago. Il faudra avoir un coût de revient très positif.»