Rémi Marcoux ne s'en cache pas. C'est avec un pincement au coeur qu'il présidera aujourd'hui sa dernière assemblée annuelle des actionnaires de Transcontinental (T.TCL.A). Après 35 années à la barre de l'entreprise qu'il a fondée en 1976, le président exécutif du conseil de Transcontinental tire sa révérence et laisse son poste à sa fille Isabelle.

«C'est avec un pincement au coeur que je vais présider ma dernière assemblée parce que j'ai eu vraiment du fun à faire ça pendant 35 ans. Je ne serai plus président exécutif du conseil, mais je vais demeurer administrateur de Transcontinental», nous a précisé hier le futur retraité, 24 heures avant son départ officiel.

Un départ tout relatif puisque Rémi Marcoux veut profiter des prochaines semaines pour faire le tour de toutes ses usines et de ses bureaux en Amérique du Nord pour aller saluer les 10 000 employés qui travaillent pour Transcontinental.

«Il en a pour au moins trois mois puisqu'on a une centaine d'unités au pays. Ça fait beaucoup à visiter», observe François Olivier, président et chef de la direction de Transcontinental depuis 2008.

Rémi Marcoux n'est pas peu fier du groupe que son équipe et lui ont réussi à bâtir au fil des ans. Transcontinental est le plus important imprimeur commercial et le principal éditeur de magazines commerciaux au Canada. Le groupe réalise des revenus annuels de 2 milliards de dollars, dont 700 millions proviennent de sa filiale TC Media.

«Je suis content parce qu'on a bâti une entreprise qui reflète les valeurs que j'avais au départ. Une entreprise intègre qui a une excellente réputation dans le marché. On a créé des milliers d'emplois et on génère de la richesse dans les collectivités où on est implanté», souligne le fondateur de Transcontinental.

Un bilan et une réputation enviables

Autre accomplissement dont il tire une satisfaction évidente, Transcontinental est l'entreprise qui affiche le meilleur bilan dans son industrie. Sa formation de comptable des HEC l'a beaucoup aidé, admet-il, mais le comptable n'a jamais freiné l'entrepreneur qu'il a toujours été.

«On a acheté des entreprises en difficultés que l'on a réorganisées et qui sont devenues profitables. Ç'a été notamment le cas avec le Journal Les Affaires que l'on a acheté en 1979. Ça nous a pris un certain temps avant de le redresser, mais cette acquisition a été le début de toute notre aventure dans le secteur de l'édition», explique Rémi Marcoux.

En 1981, en pleine récession, l'entrepreneur a encore joué d'audace en construisant une première usine à Toronto. «On a emprunté à un taux de 21%, c'était fou à l'époque, mais ça nous a ouvert un nouveau marché avec une nouvelle technologie», se rappelle-t-il.

En affaires durant 35 ans, Rémi Marcoux n'a pas réalisé que des bons coups. En 1993, Transcontinental fait l'acquisition de Disque Améric, une usine qui fabriquait des CD-DVD.

«J'étais convaincu que tous les annuaires allaient être distribués sous forme de DVD. Mais cette technologie a vite été dépassée, c'est l'internet qui a tout déclassé. On a vendu notre participation dans Disque Améric», observe-t-il aujourd'hui.

Un environnement différent

Rémi Marcoux convient qu'il ne pourrait pas lancer un nouveau Transcontinental aujourd'hui. Le monde de l'imprimé n'est pas en mode expansion, mais il est encore appelé à connaître de nombreuses bonnes années.

«On a commencé il y a 10 ans notre migration vers les médias en ligne. On accompagne les mêmes clients qu'on sert depuis des années dans l'imprimé vers les nouvelles plateformes de diffusion. Tout comme nos publications qui profitent d'une double diffusion», expose le président sortant.

François Olivier précise que Transcontinental tire aujourd'hui 10% de ses revenus des nouveaux médias numériques et que cette proportion devrait atteindre 25% d'ici cinq ans.

«Mais au-delà de tout, insiste Rémi Marcoux, Transcontinental s'est bâti en 35 ans une excellente réputation. Cela a une valeur inestimable. J'ai été le gardien de cette valeur et ce sera maintenant à ma fille Isabelle et à François Olivier de perpétuer cette valeur. Je ne suis pas inquiet, ils en sont déjà totalement imprégnés.»