La décroissance en zone euro durera quatre trimestres et entraînera un amincissement de 1,0% de la taille de son économie cette année.

Plus grave encore, elle retranchera 1% de croissance à l'économie mondiale, dont 0,8% à celle des États-Unis et même 0,6% à celle du Canada d'ici la fin de l'année.

Tel est l'avis de la Banque du Canada exprimé dans la nouvelle livraison du Rapport sur la politique monétaire (RPM). En 2012, l'économie mondiale devrait progresser de 2,9% seulement. En bas de 3%, le Fonds monétaire international (FMI) estime que le monde est en récession, même si beaucoup d'économies peuvent progresser près de leur potentiel.

La récession européenne, désormais jugée sévère et profonde par le gouverneur Mark Carney et son équipe, repose néanmoins sur l'hypothèse que les autorités parviendront à contenir la crise de la dette souveraine. Leur échec possible représente toutefois le principal risque baissier au scénario de la Banque.

Il en résultera chez nous une activité économique marquée par une expansion atone, un peu semblable à celle que nous avons connue l'automne dernier.

Durant l'hiver et le printemps, l'expansion réelle sera contenue à 1,8% seulement, en rythme annuel, après un automne estimé à 2,0%. Elle connaîtra une modeste accélération à 2,1% durant l'été. Ce n'est qu'à l'automne que la croissance devrait retrouver un rythme de 2,6%.

Pour les quatre trimestres, il s'agit de révisions à la baisse significatives. «Le profil trimestriel plus faible pour 2012 rend compte d'une incertitude plus persistante concernant les perspectives économiques et financières mondiales, qui freine la demande privée intérieure par la voie de la confiance et des liens financiers et d'une expansion projetée moins vigoureuse de l'activité à l'étranger, qui déprime les exportations canadiennes», lit-on dans le RPM.

Dans ces nouvelles prévisions, la Banque estime que le logement apportera une contribution significativement plus élevée qu'escompté en octobre où elle voyait alors une stagnation du marché de l'habitation.

En ce qui concerne les dépenses de consommation, les investissements des entreprises ou les exportations nettes, leurs contributions prévues restent sensiblement les mêmes tout comme celle des administrations publiques. Un déstockage accru entravera aussi l'expansion.

La Banque estime que la décélération de l'inflation totale et de base sera moins prononcée, mais que les deux mesures de la marche des prix évolueront bien près de sa cible de 2%, jusqu'à la fin de 2013.

Comme dans les éditions passées du RPM, la Banque prend soin de préciser que sa projection «intègre une réduction de la détente monétaire se réalisant progressivement au cours de la période de projection». Cela signifie qu'une baisse de son taux directeur n'est pas dans ses cartes, à moins que ne se s'aggrave considérablement la crise européenne, au point d'envenimer les flux financiers et le crédit de ce côté-ci de l'Atlantique.

L'équipe de Mark Carney fait désormais l'hypothèse d'une croissance légèrement plus élevée en 2012 chez nos voisins du Sud (2,0% au lieu de 1,7%). Elle mise sur la reconduction des déductions fiscales annoncées en 2010 jusqu'en fin d'année et exclut l'économie américaine des risques baissiers à son scénario.

Les exportateurs canadiens ne devraient cependant en profiter que très peu, en raison de la poussée de leurs coûts unitaires de main-d'oeuvre (CUMO). Le CUMO correspond au coût du travail en fonction des salaires et des avantages sociaux par unité de produit intérieur brut (PIB) réel, exprimé dans une monnaie donnée.

La Banque reconnaît que l'écart qui s'est creusé entre les CUMO canadiens et américains est avant tout causé par la valeur élevée du dollar canadien qui devrait rester aux environs de 98 cents US en moyenne d'ici la fin de 2013.

Pas question pour autant d'intervenir sur le marché des devises. Pareille intervention extraordinaire ne pourrait survenir qu'en cas de désordre sur ce marché ou de problèmes économiques dont la gravité excède ceux créés par la relative surévaluation du huard face au billet vert et requiert des outils monétaires non conventionnels.