L'année 2012 risque d'être celle de la retenue pour bien des acheteurs de produits de luxe. Des Tiffany&Co, Birks&Mayors et LVMH ont sonné l'alarme, plus tôt cette semaine, en annonçant que leurs ventes de Noël avaient été moins élevées que prévu et que la nouvelle année serait marquée par moins d'achats.

«Durant la dernière semaine avant Noël, nous avons vécu un déclin marqué de la clientèle dans nos magasins», souligne Thomas A. Andruskevich, PDG de Birks & Mayors, qui a tout de même connu une hausse de 5% de ses ventes en novembre et décembre.

«L'année 2011 a été exceptionnelle, mais il est difficile de penser que nous aurons le même type de croissance cette année en raison de la crise de la dette en Europe et des inquiétudes sur l'économie mondiale», dit Jean-Claude Biver, président de l'horloger Hublot, du groupe français LVMH, selon Reuters.

L'américain Tiffany & Co accuse une baisse de 1% de ses ventes dans le temps des Fêtes dans son magasin phare new-yorkais et de 2% en Europe. En dépit d'une hausse globale des ventes durant la période de Noël (de 6% en Asie-Pacifique et 1% au Japon), le titre de l'entreprise a chuté de 10% mardi, parce que les analystes s'attendaient plutôt à une croissance de 7%, rapportait hier le Wall Street Journal. Des achats précipités de cadeaux durant l'année, avant la montée des prix, expliquent en partie cette baisse. «Dans les magasins comparables, on note une hausse moyenne de 18% des ventes au cours des trois premiers trimestres de 2011», souligne l'analyste David A. Schick, de la firme Stifel Nicolaus.

«L'automne a mis les consommateurs sur un pied d'alerte, en mode observation, estime JoAnne Labrecque, professeure agrégée, marketing, de HEC Montréal. Les gens ont acheté d'une façon plus modeste, car il y a de l'incertitude dans le marché. Ça reste précaire aux États-Unis et en Europe. Du côté du luxe, les gens en moyen ont agi par osmose. Ce n'était pas in de dépenser à outrance.»

Globalement, le secteur du luxe a connu une croissance de 20% en 2011. «Nous n'attendons pas de changements radicaux pour 2012, mais une normalisation avec une croissance de 9%», résume l'analyste Léopold Authié, d'Oddo Valeurs mobilières. «L'Asie-Pacifique devrait continuer de tirer la croissance, principalement soutenue par la demande chinoise. L'émergence progressive de nouvelles zones de consommation en Asie-Pacifique (Inde, Indonésie) devrait ponctuellement faire sentir ses effets et constitue un relais de croissance pour le long terme.»

«La Chine connaît encore un bon taux de croissance, ajoute JoAnne Labrecque. La demande devrait encore être soutenue, car les nouveaux riches ont une capacité de dépenser surprenante.»

L'Europe vivra, quant à elle, deux dynamiques, selon Léopold Authié: «D'un côté, un ralentissement de la demande locale, causé par les effets de la crise, explique l'analyste. De l'autre, une augmentation de la part des revenus issus du tourisme.»

Le ralentissement de la croissance des détaillants de luxe sera aussi motivé par le frein de l'augmentation des prix au détail. «Une partie de la croissance en 2012 est attribuée à l'impact positif de la hausse des prix, note Léopold Authié. Ces augmentations sont intervenues de manière ciblée. Les acteurs horlogers (Swatch, Richemont) ont été plus actifs sur ce front afin de faire face à l'envolée du cours des matières premières, mais également à l'impact négatif de la hausse du franc suisse. Dans un contexte de stabilisation des matières premières et dans un environnement devises favorables, nous estimons que la hausse des prix devrait être limitée en 2012.»