L'automne aura été désastreux pour le marché du travail au Québec, seule province qui a terminé l'année avec moins d'emplois qu'au 1er janvier.

En décembre, le Québec s'est distingué du reste du Canada par la perte de 25 700 emplois, poussant l'hémorragie à 51 000 par rapport au début de l'année, selon les données de Statistique Canada.

D'un océan à l'autre, le nombre d'emplois a augmenté de 17 500, après deux reculs mensuels d'affilée. Cela n'aura pas suffi toutefois à contenir le taux des demandeurs d'emploi qui augmente d'un dixième à 7,5%. Tous les nouveaux emplois sont à temps partiel et se retrouvent dans la catégorie précaire des travailleurs autonomes.

C'est néanmoins moins mauvais que les résultats du Québec dont le taux de chômage a bondi de sept dixièmes à 8,7%. C'est 1,2 point de plus qu'un an plus tôt. Il se situe maintenant à un point de pourcentage plus élevé que celui de l'Ontario qui s'est enrichi de 91 300 emplois, de janvier à décembre. En début d'année, le taux de chômage québécois était inférieur à celui de son grand voisin occidental.

La perte d'emplois de décembre au Québec s'ajoute aux 30 500 postes supprimés en novembre. Il s'agit de la pire séquence à ce jour. Si on ajoute à cela le recul d'octobre, on arrive à une saignée de 69 500 postes au quatrième trimestre.

«Je ne suis pas alarmiste, insiste Joëlle Noreau, économiste principale chez Desjardins. J'ai souvent vu de beaux revirements et on pourrait assister à une correction au cours des prochains mois.»

C'est aussi l'avis de Matthieu Arseneau, économiste à la Banque Nationale. «Malgré l'ampleur alarmante de la détérioration, il ne faut pas conclure que l'économie de la province soit en récession, insiste-t-il. Nous pensons que les chiffres sur l'emploi au Québec devraient être nettement meilleurs dès l'an prochain.»

L'agence fédérale mène tous les mois son Enquête sur la population active auprès de quelque 56 000 ménages à l'échelle du pays. Malgré la grande taille de l'échantillon, les résultats mensuels sont volatils. Il vaut mieux se fier à la tendance observée au cours des trois ou des six derniers mois.

Force est alors de constater que la dégradation du marché du travail observée à l'échelle du pays est bien plus prononcée au Québec.

Le taux de chômage au Canada a atteint son creux du présent cycle de 7,1% en septembre. Il a depuis grimpé de quatre dixièmes. Le creux du Québec a été atteint en juillet à 7,5%. «À moins d'une remontée significative en janvier ou février, il serait surprenant que l'emploi au Québec retourne à son sommet de la mi-2011 d'ici à la fin de 2012», prévient Jacques Marcil, économiste principal chez TD.

En juillet, le Québec comptait 3 980 000 emplois, ce qui représente un écart à combler de 77 300. C'est une cible que le Québec a pu franchir à trois reprises seulement au cours des 11 dernières années, dont deux suivaient une récession ou un net ralentissement.

Le taux d'emploi, qui reflète la proportion des détenteurs d'un gagne-pain au sein de la cohorte des 15 ans et plus n'était plus que de 59,1% en décembre. «Il s'agit du taux le plus faible depuis mars 2002», rappelle Mme Noreau.

Elle souligne cependant que la perte de 51 000 emplois observée de décembre à décembre est une sorte d'illusion. Décembre 2010, le nombre d'emplois au Québec avait augmenté de 25 000 portant le total à son sommet de l'année. La perte de décembre 2011 porte le total à son niveau le plus faible de l'année. Si on calcule la variation du nombre d'emplois selon la méthode des moyennes annuelles, on obtient plutôt 38 500 emplois de plus en 2011 qu'en 2010. En revanche, le chiffre de 2010 est ramené de 101 800 à 66 700. Cela renforce l'idée qu'il faudra du temps pour retrouver le nombre d'emplois observé en juillet.

Même s'il devait y avoir une certaine reprise des embauches durant l'hiver, tous les économistes s'entendent pour dire que 2012 sera au mieux marqué par une faible croissance économique à travers le pays et que celle du Québec pourrait bien être inférieure à la moyenne canadienne.