Son ton posé détonne dans l'industrie des médias, mais Ian Greenberg n'a pas apprécié les remarques de Quebecor, son nouveau concurrent dans les chaînes de télé spécialisées francophones, au CRTC au sujet du renouvellement des licences d'Astral Media (T.ACM.A), qui a annoncé hier la deuxième hausse significative de son dividende en autant d'années.

> Suivez Vincent Brousseau-Pouliot sur Twitter

Qualifiant de «faramineux» les profits de son concurrent, Quebecor demande au CRTC de ne pas accéder aux demandes d'Astral, qui veut être traité comme un groupe de chaînes et consacrer globalement 30% de ses revenus aux émissions canadiennes.

«Je ne m'abaisserai pas à ça. Leurs arguments n'ont aucun sens. D'un côté, ils n'aiment pas nos propositions. De l'autre, ils ne veulent pas du tout de réglementation», a dit Ian Greenberg, président et chef de la direction d'Astral Media, en entrevue à La Presse Affaires en marge de l'assemblée annuelle de l'entreprise tenue hier à Toronto.

Pendant que le Groupe TVA lançait trois chaînes spécialisées en 2011 - Mlle et TVA Sports en français, Sun News en anglais -, Astral ne lançait qu'une chaîne spécialisée anglophone, Disney XD.

En 2012, Astral veut lancer deux nouvelles chaînes spécialisées, dont une chaîne francophone de séries policières et criminelles. Le nom provisoire déposé au CRTC? Investigation. «Il n'y a pas de chaîne francophone du genre au Canada, dit Ian Greenberg. En nous basant sur nos recherches et en regardant aux États-Unis, nous constatons que c'est le créneau qui connaît la croissance la plus importante.»

Astral a déjà commencé à négocier avec les distributeurs pour lancer Investigation. «Lancer une chaîne n'est jamais facile, pour nous comme pour tout le monde», dit M. Greenberg.

La dernière chaîne francophone d'Astral, Disney Junior, a été le fruit d'un accouchement difficile. Astral a obtenu une licence pour une chaîne pour enfants - intitulée VRAK Junior au départ - en 2006, mais des négociations difficiles avec Vidéotron, qui comprend environ 50% des abonnés à la télé spécialisée au Québec, ont forcé Astral à changer ses plans.

Astral s'était plaint de la situation au Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC). Quebecor a lancé sa propre chaîne pour enfants, Yoopa, au printemps 2010, tandis qu'Astral a lancé Disney Junior d'abord chez Bell à l'été 2010 puis chez Vidéotron en février dernier.

Dans la langue de Shakespeare, Astral pourrait notamment lancer en 2012 une troisième chaîne de dessins animés, TELETOON Kapow, en partenariat avec Corus. Pas question toutefois de verser dans le sport, au contraire de ses concurrents Bell (TSN, RDS), Rogers (Sportsnet) et Quebecor (TVA Sports).

«Ce n'est pas notre créneau, ça coûte cher et nous n'avons pas l'expertise. Nous nous concentrons sur le drame, la programmation jeunesse et l'auditoire féminin», dit Ian Greenberg, qui a suivi avec intérêt l'achat des Maple Leafs de Toronto la semaine dernière par Bell et Rogers. «De l'extérieur, ça a l'air d'une décision brillante, dit-il. Le prix du contenu sportif en Amérique du Nord augmente de façon incroyable. Soit Rogers et Bell paient un prix exorbitant pour leur contenu, soit ils trouvent une façon de contrôler et partager les coûts en devenant propriétaires.»

Augmentation du dividende

Pour la deuxième année consécutive, Astral a annoncé une hausse significative de son dividende, qui passera de 0,75$ à 1,00$ par action sur une base annuelle en 2012. Après trois ans au cours desquels il est resté stable, le dividende d'Astral est passé de 0,50$ à 0,75$ par action en 2011. Astral a aussi annoncé hier le renouvellement de son programme d'achat d'actions.

«Heureusement, nous générons assez d'argent pour racheter des actions, réduire notre coût d'emprunt et augmenter notre dividende, ce qui était demandé par nos actionnaires», dit Ian Greenberg.

Financièrement, Astral, qui détient 23 chaînes de télé (VRAK.TV, Canal Vie, Canal D), 83 stations de radio (NRJ, Rouge FM, Boom FM) et 9500 faces d'affichage au pays, a les reins solides. L'entreprise montréalaise a vu ses profits croître à tous les trimestres depuis 15 ans (excluant les charges exceptionnelles).

Au cours de l'année financière se terminant le 31 août dernier, Astral a généré des profits de 257 millions sur des revenus de 1,015 milliard. Son titre, en hausse de 0,15% hier pour clôturer la séance 33,70$, s'est déprécié de 19,8% en 2011.

Sept des neuf analystes boursiers répertoriés par Bloomberg recommandent d'acheter le titre d'Astral avec un cours cible moyen à 41,88$.