«Vendez votre or», «Nous achetons vos bijoux»: dans le centre d'Athènes, les boutiques qui rachètent de l'or, tirant profit de l'envolée des cours du métal jaune et de la paupérisation des Grecs ont poussé comme des champignons, mais ne font pas toujours des affaires en or.

Depuis quelques mois, les acheteurs de métaux précieux inondent les boîtes aux lettres et les lieux publics de tracts publicitaires. Dans le métro, des affiches suggèrent aux Grecs de se débarrasser de leurs croix de baptême pour se payer des vacances de rêve.

Sur Ermou, la grande rue commerçante piétonnière qui part de la place Syntagma, où siège le Parlement, les bijoutiers ou agents de change, qui pratiquaient accessoirement cette activité, subissent désormais la concurrence d'innombrables officines qui font du battage à grands renforts d'enseignes lumineuses.

Malgré tout leur tapage publicitaire, ces marchands d'or ne sont pas toujours très accueillants. Dans cette officine située en étage, protégée par une porte blindée, une employée fait savoir que le propriétaire est à l'étranger et qu'elle a consigne de ne pas parler à la presse.

Ils sont aussi très discrets sur leurs marges, et la destination de l'or acquis. «Entre 5 et 10%», consent par lâcher Angeliki, employée dans une bijouterie, qui se plaint de la forte concurrence dans le centre de la capitale.

Ailleurs, où leurs enseignes flambant neuves tranchent avec l'état de délabrement avancé des immeubles et commerces à vendre ou à louer en raison de la crise, comme sur cette artère débouchant sur le port du Pirée, les marges sont plus confortables, croit savoir la bijoutière.

Dopé par un appétit accru des investisseurs, inquiets de l'économie chancelante et des déboires de la zone euro, mais également par les achats des banques centrales, l'or a atteint début septembre son sommet historique, à 1.921 dollars l'once.

GoldBuyers, une chaîne qui a ouvert plusieurs points de vente à Athènes et en banlieue, en a fait son principal argument de vente. «Le cours de l'or a grimpé de 300% ces cinq dernières années», indique son site internet. En réalité, il a augmenté de moitié moins sur la période.

En Grèce, le développement de ce négoce est favorisé par la récession.

«Il y a deux types de clients», témoigne un employé de GoldBuyers : «Ceux qui, profitant de la hausse de l'or, vendent de vieux bijoux de famille pour s'acheter autre chose», comme un téléphone portable dernier cri, et «ceux qui le font par manque d'argent».

Les clients qui viennent chez Angeliki vendre leurs crucifix, reliquaires, médailles de baptêmes, montres ou pièces d'or, un cadeau de naissance traditionnel en Grèce, appartiennent à la seconde catégorie. «Quand on est au chômage, et qu'on doit payer les factures d'électricité, les impôts, les cours particuliers des enfants, il n'y a souvent pas d'autre solution», explique la jeune femme.

«J'en ai vu qui pleuraient», témoigne Angeliki, précisant que ce sont plutôt des femmes entre 30 et 50 ans qui sont poussées à cette extrémité. La plupart du temps, elles le font à l'insu de leur famille.

En cette fin d'après-midi, la clientèle n'est pas nombreuse.

Les manifestations qui ont lieu presque tous les jours place Syntagma ne sont pas bonnes pour les affaires, explique un commerçant.

En outre, ces officines n'ont pas bonne presse. La brigade financière grecque enquête sur un trafic à destination de l'Allemagne. Et a mené des contrôles fiscaux dans 60 de ces officines, dont 48 étaient en infraction.