TVA ne veut plus être obligé par le CRTC de diffuser un nombre minimal d'émissions canadiennes aux heures de grande écoute ni de consacrer un minimum de son budget de programmation aux producteurs indépendants.

Quebecor fera part de ces demandes ce matin au Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC), qui se penche cette semaine sur le renouvellement des licences du Groupe TVA, d'Astral, de V et du canal Évasion, lors d'audiences tenues à Québec et Montréal.

TVA propose de s'engager à consacrer 75% de son budget de programmation à des émissions produites au Canada (en pratique au Québec). À titre de comparaison, TVA y a consacré 86% de son budget en 2010-2011. En revanche, TVA demande d'abolir les règles l'obligeant à diffuser huit heures d'émissions canadiennes par semaine aux heures de grande écoute (dont six heures de productions indépendantes) et à consacrer un montant minimal de son budget d'émissions canadiennes pour des productions indépendantes. Une révision des règles qui inquiète l'Association des producteurs de films et de télévision du Québec (APFTQ). Surtout que Quebecor est le seul diffuseur majeur au pays incapable de s'entendre avec l'APFTQ sur un contrat type pour la vente des émissions à la télé, sur le web et sur DVD.

«Quebecor cherche à faire affaire avec des sous-traitants de TVA plutôt qu'avec des producteurs indépendants», observe Michel Arpin, ancien vice-président du CRTC devenu professeur de communications à l'Université de Montréal.

En juillet dernier, le CRTC a aboli les règles de diffusion d'émissions canadiennes aux heures de grande écoute sur les réseaux anglophones pour les remplacer par de nouvelles règles. CTV, Global et City TV doivent maintenant consacrer 30% de leurs dépenses de programmation à des émissions canadiennes, dont 5% à des émissions d'intérêt national comme les séries dramatiques, les documentaires, les émissions jeunesse et les galas comme les Junos. Soixante-quinzepour cent de ces émissions d'intérêt national doivent être produites par des indépendants. Quebecor ne veut pas non plus une version de ces règles adaptée au marché québécois, où la production locale est environ deux fois et demie plus importante.

L'APFTQ recommande que TVA soit forcé de dépenser 80% de son budget de programmation en émissions canadiennes, dont 40% de ce budget canadien aux productions indépendantes (sa moyenne depuis trois ans).

Quebecor se défend de vouloir marginaliser les producteurs indépendants, qui ont produit 95% des émissions en période de grande écoute à TVA en 2009-2010. «Les producteurs indépendants [...] représenteront toujours des partenaires précieux, [...] [mais] le temps n'est plus à considérer quelles nouvelles obligations, contraintes ou [quels nouveaux] quotas pourraient être imposés à la télévision généraliste», écrit Quebecor dans son mémoire.

Productions J, l'entreprise de Julie Snyder (la conjointe du président de Quebecor, Pierre Karl Péladeau), est considérée comme un producteur indépendant pour le CRTC, car Quebecor n'a pas d'intérêts commerciaux dans cette firme, qui se trouve notamment derrière le succès de Star Académie et d'Occupation double. D'autres indépendants produisent des émissions de TVA comme La Promesse et Toute la vérité.

La demande de Quebecor d'abolir les règles protégeant les producteurs indépendants survient alors que les deux parties ne peuvent s'entendre sur un contrat type pour la vente d'émissions à la télé, sur le web et sur DVD. L'APFTQ a conclu une entente avec Astral, Bell, Corus, Rogers et Shaw, mais dit se «buter à un refus de négocier» de Quebecor. «Il est évident que pris isolément chacun des producteurs indépendants se retrouve en position de faiblesse avec une entreprise aussi puissante et dominante que Quebecor», écrit dans son mémoire l'APFTQ, qui suggère de renouveler la licence de TVA seulement pour deux ans si une entente type n'est pas conclue d'ici la mi-janvier. Quebecor s'oppose à ce que le CRTC se mêle des négociations avec l'APFTQ, menaçant d'attaquer en cour la constitutionnalité d'une telle démarche. L'APFTQ et Quebecor n'ont pas donné d'entrevue avant le début des audiences du CRTC.

Astral

Propriétaire de 13 chaînes spécialisées dont Canal D, Canal Vie et VRAK.TV, Astral propose au CRTC de hausser de 28,6% à 30% la part de son budget de programmation consacrée aux émissions canadiennes. En contrepartie, Astral réduirait de 5% le nombre d'heures de programmation canadienne sur ses chaînes. «Nous voulons miser sur la qualité plutôt que sur la quantité», dit Hugues Mousseau, porte-parole d'Astral, qui veut dorénavant calculer ses dépenses de programmation sur l'ensemble de ses chaînes plutôt que pour chaque chaîne individuellement.

Autre demande d'Astral: réduire de 50% à 30% la part des vidéoclips dans la programmation de MusiquePlus. Ce serait les vidéoclips anglophones qui écoperaient puisque le quota de vidéoclips francophones augmenterait de 35% à 50% pour compenser la baisse du nombre total de vidéoclips.