Sans avoir retrouvé leur sommet prérécession, les bénéfices d'exploitation des entreprises canadiennes étaient «confortables» au troisième trimestre.

Ils ont totalisé 64 milliards de dollars, en baisse de 0,5% par rapport à ceux du printemps, selon Statistique Canada, mais en hausse de 9,1% par rapport à ceux de l'été 2010.

En proportion de la taille de l'économie, ils ont cependant reculé davantage puisque l'été a vraisemblablement été marqué par une expansion annualisée de quelque 3% du produit intérieur brut (PIB) en termes réels et d'environ 6% en termes nominaux, ou en dollars courants.

«Au deuxième trimestre, ils étaient au-dessus de leur moyenne historique», mais loin de leur sommet de quelque 75 milliards, selon Robert Kavcik, économiste chez BMO Marchés des capitaux.

Le léger recul trimestriel est attribuable au secteur financier, et tout particulièrement à son segment des assurances. Les bénéfices du secteur financier se sont repliés de 11,0% après un recul de 9,8% au deuxième trimestre.

La rentabilité des banques n'est pas en cause. C'est plutôt celle des compagnies d'assurance-vie. Comme les caisses de retraite, elles pâtissent de la faiblesse des taux d'intérêt obligataires qui gonfle la valeur de leurs engagements, surtout dans le provisionnement des rentes viagères.

Quatorze des vingt-deux segments industriels recensés enregistrent une rentabilité accrue. Le commerce de gros et de détail a accru ses marges. En revanche, le secteur manufacturier essuie un léger recul de 0,3% qui camoufle de larges disparités: les produits du pétrole et du charbon ont bondi de 13,5%, ce qui représente un rattrapage après les ruptures de production du printemps. Le secteur papetier enregistre de son côté une chute de rentabilité de 43,1%.

«Sur une base annuelle, la croissance des bénéfices totaux ralentit légèrement et cette tendance devrait se poursuivre, prédit Leslie Preston, économiste chez TD. Les entreprises font face à une demande qui faiblit, à une monnaie relativement forte et à des prix moins soutenus des biens de base. Tout cela concourt vers une croissance modérée des profits pour les mois à venir.»

Selon M. Kavcik, les bénéfices d'exploitation des entreprises représentent environ 11% de la taille de l'économie canadienne. C'est moins que les 13% des entreprises américaines. Il s'agit d'un ratio qui a été surpassé une seule fois en 70 ans, au début des années 50.

L'économiste attribue cette performance aux gains de productivité au sud de la frontière où les entreprises n'ont pas hésité à licencier massivement pour préserver leurs marges et les dividendes de leurs actionnaires.

Autre différence marquée, les entreprises américaines utilisent moins leurs liquidités pour investir, au cours du présent cycle, à la différence des entreprises canadiennes qui doivent corriger leur faible productivité.

«Compte tenu de la dépréciation, le stock de capital en équipements et logiciels a essentiellement stagné depuis 2008 aux États-Unis, a observé Matthieu Arseneau, économiste à la Banque Nationale dans une récente analyse publiée dans L'Hebdo économique de l'institution de la rue De La Gauchetière. Les entreprises n'ont donc pas privilégié le capital physique au détriment des emplois dans la reprise actuelle, la croissance ayant été décevante ans les deux cas.»

Faute d'investir au-delà de l'essentiel, les entreprises américaines accumulent des réserves de liquidités qu'elles utilisent en partie pour diminuer leur capitalisation, dans le but d'augmenter le bénéfice par actions au cours des prochains trimestres.

La contrepartie, c'est que le potentiel de la croissance américaine s'affaiblit, ce qui explique en partie que l'expansion sera molle au cours des prochains trimestres.