Le Groupe Juste pour rire organisera un festival de jeu vidéo au Palais des congrès de Montréal à l'été 2013. Un projet ambitieux qui suscite néanmoins quelques questions dans l'industrie florissante du jeu vidéo. Surtout que Montréal compte déjà sur son Sommet international du jeu vidéo, réservé aux professionnels de l'industrie.

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Avec environ 8200 employés dans l'industrie du jeu vidéo, le Québec est l'un des plus importants producteurs au monde avec la Californie, la Chine, le Japon et la Colombie-Britannique. Mais le Groupe Juste pour rire et le Palais des congrès veulent réunir les consommateurs de jeu vidéo - 50 000 d'entre eux par année, pour être exact. «Il y aura un esprit festif, ce sera pour le grand public avant tout», dit André Picard, vice-président des affaires publiques et corporatives du Groupe Juste pour rire. «Un festival similaire à Boston attire 70 000 personnes en quatre jours», dit Marc Tremblay, PDG du Palais des congrès de Montréal, qui se cherchait un promoteur pour un événement de jeu vidéo depuis un an.

Plusieurs expositions de jeu vidéo ont lieu chaque année dans le monde, dont le festival Gamescom à Cologne, en Allemagne (275 000 participants), le Tokyo Game Show (200 000 participants) et le E3 à Los Angeles. «Quelques villes ont des grands événements de jeu vidéo, mais elles n'ont pas d'industrie du jeu vidéo ni de tradition de festivals comme Montréal», dit André Picard, du Groupe Juste pour rire.

L'Alliance numérique a déjà pensé à incorporer un volet grand public à son Sommet international du jeu de Montréal avant d'abandonner l'idée. «Nous n'avions pas l'appui de l'ensemble de l'industrie, dit Pierre Proulx, directeur général de l'Alliance numérique. Un volet grand public coûte très cher. Au E3, c'est 1 million de dollars par kiosque. Depuis 2008, les studios ont réduit leurs budgets pour ce genre d'événements. Ce n'est pas pour rien qu'il n'y a qu'un événement d'envergure du genre par continent. En plus, le Canada n'est pas un gros marché de consommateurs. Los Angeles et Toyko comptent des dizaines des millions de résidants. Ils attirent 200 000 personnes durant un week-end, mais 95% de leur clientèle est locale.»

Il y a aussi le spectre du Festival Arcadia, événement grand public consacré au jeu vidéo qui a été présenté à Montréal de 2005 à 2008 avant de mourir faute de moyens financiers. Un échec qui ne fait pas peur à Juste pour rire. «C'est comme dire que les gens qui n'aiment pas un film n'iront plus au cinéma, dit André Picard, du Groupe Juste pour rire. Il y a des films qui marchent et d'autres qui ne marchent pas.»

Arcadia attirait entre 10 000 et 25 000 personnes par année, mais son principal problème était de dénicher des commanditaires. À ce chapitre, le Groupe Juste pour rire part sur des assises plus solides. Mais Marie-Annick Boisvert, qui a organisé Arcadia en 2005 et 2006, n'est tout de même pas convaincue. «Peu de studios risquent d'embarquer dans ce projet en plein été car leurs jeux ne sont pas encore prêts, dit-elle. Leur timing est mauvais.»

Plusieurs intervenants s'inquiètent aussi des répercussions du Mondial du jeu vidéo sur le Sommet international du jeu vidéo, qui accueille environ 1700 professionnels de l'industrie au début de novembre. «Nous visons une exposition grand public, une clientèle touristique et des concours entre les gamers. Il y a aura une complémentarité entre les deux événements», dit Marc Tremblay, du Palais des congrès de Montréal.

Soit, la clientèle est différente. Mais ce sont les mêmes studios qui déboursent pour participer aux deux festivals. «C'est le même portefeuille, dit Pierre Proulx, de l'Alliance numérique. Ça pourrait arriver qu'un événement fasse mal à l'autre.»

Le Groupe Juste pour rire fera une «version beta» du Mondial du jeu vidéo de Montréal à l'été 2012 avant de présenter une première édition officielle à l'été 2013.