La Cour supérieure du Québec a donné le feu vert à un recours collectif contre Bell Canada pour avoir imposé des frais de résiliation aux clients qui ont débranché leur ligne téléphonique.

Le recours englobera tous les abonnés de la téléphonie résidentielle de Bell au Québec qui se sont vus facturer, depuis le 1er octobre 2007, des frais d'annulation ou de résiliation en vertu d'un contrat conclu avant le 30 juin 2010.

À partir de 2007, l'ancien monopole des télécommunications a changé son mode de facturation pour faire face à l'arrivée de la concurrence. Bell s'est mis à offrir des rabais à ses clients de longue date qui concluaient une entente de service de 12 ou 24 mois. Or, ces ententes prévoyaient des frais de résiliation anticipée de 75$ ou de 150$, ainsi que des frais d'annulation pour les clients qui partaient sans donner un préavis de 30 jours.

C'est ce qui est arrivé Serge Barbeau et à Robert Morin, un lecteur de La Presse qui a intenté le recours collectif après avoir pris connaissance d'un cas semblable au sien dans la chronique «Les bons comptes font les bons amis», publiée en janvier 2010ns nos pages.

En 2010, Bell a réclamé des frais de 69,76$ à M. Barbeau qui venait de changer de fournisseur. Le client a payé les frais, sous protêt, pour éviter que son dossier de crédit ne soit entaché.

Quant à M. Morin, Bell lui a imposé des frais de 189,12$ en 2009. Comme il a toujours refusé de payer, Bell a confié son dossier à une agence de recouvrement qui l'a relancé à plusieurs reprises. Toutefois, le dossier n'a pas été transmis aux agences de crédit.

Les deux anciens clients affirment qu'ils n'ont jamais conclu d'entente avec Bell et qu'ils ont encore moins été informés des frais de résiliation. Ils réclament donc le remboursement des frais payés en trop, 500$ par personne pour les inconvénients découlant des démarches de recouvrement, ainsi que 2 millions de dollars pour l'ensemble du groupe à titre de dommages punitifs.

De son côté, Bell estime que les clients connaissaient les règles du jeu. Dans les publicités envoyées par la poste, Bell précisait, en petits caractères, la durée de l'engagement ainsi que l'imposition de frais de résiliation et d'annulation avant l'échéance du contrat. Au téléphone, les représentants de Bell étaient censés récapituler toutes les clauses de l'entente: durée du contrat, pénalité, etc. Et une fois l'entente conclue, Bell expédiait une lettre de bienvenue, incluant les détails du forfait.

Dans un jugement de 22 pages rendu vendredi dernier, la juge Manon Savard a autorisé l'exercice du recours collectif et elle a accordé le statut de représentants aux deux anciens clients de Bell.

La juge a considéré que la pratique de Bell «pourrait brimer le droit à la résiliation unilatérale d'un contrat et que ça pourrait constituer des frais abusifs dans la mesure où les frais facturés aux clients excèdent le préjudice réel subi par Bell Canada», expose Me David Bourgoin, du cabinet BGA Avocats, qui pilote le recours.

Depuis l'entrée en vigueur de la réforme de la Loi sur la protection du consommateur, en juin 2010, les fournisseurs de télécommunications ne peuvent plus menotter leurs clients. Un consommateur a le droit de résilier son contrat, «à tout moment et à sa discrétion». Et le fournisseur ne peut pas exiger une pénalité supérieure au «bénéfice économique» consenti au départ, comme un rabais ou un téléphone cellulaire gratuit, par exemple.

D'ailleurs, un autre recours collectif visant Bell Mobilité a été autorisé en janvier dernier. Ce recours, qui émane aussi d'un article de La Presse, porte sur les frais de résiliation de contrat exigés depuis 2007 aux clients qui ont interrompu leur contrat de téléphonie cellulaire. «Si tout va bien, le procès pourrait se dérouler au début de 2013», avance Me Bourgoin.