En juillet, la Banque du Canada avait identifié trois risques baissiers à son scénario économique et à ses perspectives en matière d'inflation: la crise de la dette souveraine en Europe, la vigueur persistante du dollar canadien et une trop faible croissance des dépenses des ménages.

Depuis, la crise européenne s'est amplifiée, le huard a quelque peu faibli, mais reste fort alors que le budget des ménages est hypothéqué par les prix élevés de l'essence et la faiblesse des augmentations de salaire, limitées à 1,5% par année, le mois dernier.

On pourrait ajouter aussi que si les risques de rechute imminente en récession de l'économie américaine se sont atténués, le dysfonctionnement du Congrès suscite de grandes inquiétudes pour l'économie de l'Oncle Sam en 2012 et 2013.

En principe, cela devrait signifier croissance plus faible que prévu et modération du rythme d'inflation au Canada. En pratique, l'expansion ralentit bel et bien, mais la marche des prix accélère ici comme ailleurs en Occident.

Demain, la Banque reconduira sans surprise son taux directeur, fixé à 1,0% depuis septembre 2010. Son gouverneur Mark Carney a déjà indiqué qu'il pouvait tolérer un taux supérieur à la cible un certain temps, si les risques à la croissance ou à la stabilité financière sont très élevés, comme c'est le cas maintenant.

Mercredi, elle nous annoncera cependant que l'expansion de 2011 aura été inférieure aux 2,8% envisagés en juillet. Depuis, Statistique Canada a révélé que l'économie canadienne s'était contractée de 0,4% en rythme annuel d'avril à juin, ce qui est bien loin de la croissance de 1,5% escomptée par les autorités monétaires. L'agence fédérale a en outre ramené de 3,9% à 3,6% le rythme annualisé de la croissance de janvier à mars.

La prévision de 2,8% et de 2,9% pour les troisième et quatrième trimestres paraît aussi hors de portée.

Du côté de la marche des prix, la Banque s'attendait à un taux d'inflation de 2,8% au troisième trimestre. Ce fut plutôt 3,0%.

En revanche, son indice de référence a vogué comme prévu à 1,9%, mais il part de haut (à 2,2% en septembre) pour rester à la cible de 2,0% durant tout l'automne.

Le dollar canadien ne permet plus d'absorber la hausse des prix des biens importés. Le yuan s'apprécie lentement face au dollar américain alors que l'inflation chinoise dépasse les 6%. Le prix de ses marchandises vendues au Canada - il y en a quand même beaucoup! - augmente aussi.

Le prix des services augmente aussi. En septembre, ils progressaient à 2,7%. Cela semble indiquer qu'il existe peu de capacités excédentaires et que les entreprises ont une certaine marge pour augmenter leurs prix.

Comme c'est le cas à chaque publication du Rapport sur la politique monétaire en octobre, la Banque en profitera pour réviser son estimation du potentiel de croissance de l'économie canadienne, c'est-à-dire le taux optimal d'expansion, sans générer d'inflation au-delà de la cible de 2%. En 2010, la Banque avait établi le potentiel à 1,8% en 2011 et à 2,0% en 2012.

Il ne serait pas surprenant que cela soit révisé légèrement à la baisse, ce qui permettrait d'expliquer en partie que l'inflation soit si tenace.