Après avoir réalisé une nouvelle percée importante dans le marché américain l'an dernier, en payant 940 M $ pour acquérir la société Stanley, le Groupe CGI continue de tirer profit de cette transaction stratégique. « On vise toujours à doubler à 7 milliards notre chiffre d'affaires annuel d'ici deux à quatre ans », soutient avec assurance Michael Roach, le président et chef de la direction de la société montréalaise spécialisée dans les technologies de l'information.

Depuis l'acquisition en 2004 de American Management Systems (au coût de 1,1 G $), CGI avait un pied bien ancré en sol américain. L'ajout de la firme Stanley qui était solidement implantée comme fournisseur de services du gouvernement fédéral américain lui a toutefois permis d'accéder au vaste et lucratif marché des contrats de la sécurité et de la défense nationales.

« Pour pouvoir participer aux appels d'offres du gouvernement américain et de la défense nationale, il faut être une entreprise américaine. On a intégré Stanley dans une nouvelle entité, CGI Federal, qui se rapporte à CGI USA », explique Michael Roach.

« Je suis sur le conseil d'administration de CGI Federal mais, à titre de citoyen canadien, je dois me retirer des réunions du conseil dès qu'il est question de contrats touchant à la sécurité nationale. On a suivi toutes les étapes pour demeurer un fournisseur en règle du gouvernement et on se classe aujourd'hui au 28e rang des 50 plus gros joueurs qui font affaire avec le gouvernement américain. »

Le gouvernement des États-Unis dépense annuellement 100 G S en services de technologies de l'information, des dépenses qui représentent à elles seules trois fois l'ensemble de tout le marché canadien. CGI retire pour l'instant 1,3 milliard de revenus de contrats du gouvenrment américain.

« L'acquisition de Stanley nous a surtout permis d'acquérir un expertise dans le secteur militaire, principalement dans les services analytiques de pointe, telles la biométrie, la cybersécurité et la logistique opérationnelle », souligne le PDG.

« Cette expertise nous permet maintenant de soumissionner sur les contrats militaires du gouvernement canadien. Il s'agit d'un marché annuel de 2 milliards où on était marginalement présent avec des revenus annuels de seulement 10 M $. »

C'est ce qui explique pourquoi CGI a annoncé la semaine dernière la création d'une toute nouvelle unité d'affaires canadienne qu'elle a baptisée Défense, sécurité publique et renseignement.

CGI a confié la direction de cette nouvelle entité au lieutenant-général Andrew Leslie, un militaire de renom qui vient de prendre sa retraite des Forces armées canadiennes et qui a été Chef d'état-major de l'Armée de terre et Chef de la Transformation.

En l'espace d'un an, CGI vient donc d'entrer de plain-pied dans un secteur où elle était à peu près absente jusque-là. Est-ce qu'on a craint d'altérer l'image de l'entreprise en investissant ce nouveau secteur d'activités bien particulier ?

« Non pas du tout. Cela fait plusieurs années qu'on voulait travailler pour la défense nationale. Mais pour le faire, tu dois avoir des références, un nom, une expertise. En acquérant Stanley on s'est positionné dans le secteur de la défense et on a maintenant beaucoup de compétences à partager dans des domaines stratégiques.

« On travaille dans le secteur de la sécurité, on n'a pas les pieds sur les terrains de combat, on ne participe pas à la fabrication d'armes », précise Michael Roach.

Les nouveaux développements

CGI retire maintenant près de la moitié de ses revenus annuels de 4,2 G $ (revenus prévus de 2012) aux États-Unis. Plus de la moitié des revenus américains proviennent du secteur public ; le gouvernement fédéral, les États et les grosses municipalités telles New York et Washington.

Les problèmes budgétaires du gouvernement fédéral et des États américains ne constituent pas une menace pour Michael Roach et CGI mais bien plutôt une opportunité de croissance, selon lui.

« Aux États-Unis, le gouvernement central et les États cherchent à retrouver à tout prix l'équilibre budgétaire et les technologies de l'information sont un outil indispensable pour atteindre ces objectifs », fait valoir Michael Roach.

Ainsi, l'an dernier, CGI a mis au point un logiciel de recouvrement d'impôts impayés qui a permis à l'État de Californie de récupérer plus de 520 M $ d'impôts qui flottaient.

C'est un autre programme informatique de CGI qui a permis au gouvernement Obama de suivre à la trace les 787 milliards de fonds de stimulation économique qui ont été débloqués pour faire face à la dernière récession. Les technologies de l'information sont donc devenues un outil essentiel à la gestion budgétaire des organisations gouvernementales américaines.

Il n'en reste pas moins que Michael Roach a été éprouvé cet été lorsque le Congrès américain a forcé le gel de toutes initiatives de dépenses durant la crise autour du déplafonnement de la dette des États-Unis. Quelque 150 contrats du gouvernement américain sur lesquels CGI avait soumissionné - totalisant 1,5 milliard de dollars - ont été gelés durant de longs mois.

« La situation s'est rétablie avec l'entente du 2 août. La moitié des contrats ont été accordés et on a été retenu sur la moitié d'entre eux », explique avec soulagement le PDG. Selon lui, CGI devrait obtenir l'autre moitié des contrats qui restent à être octroyés.

Au moment de notre rencontre, Michael Roach venait de terminer une des sept vidéoconférences que la haute direction de CGI organise une fois par année pour ses 31 000 employés disséminés à travers le monde.

« C'est leur assemblée annuelle qu'on organise spécialement pour eux. Plus de 90 % de nos employés sont actionnaires de la compagnie. Ça fait partie de la philosophie qu'a implantée Serge Godin. Des employés-propriétaires ont beaucoup plus à coeur l'avenir de leur entreprise.

« On n'a pas de fonds de pension chez CGI mais on donne une action du Groupe pour chaque action qu'un employé achète. Depuis 2006, l'action s'est appréciée de 225 %. C'est une excellente motivation pour tout le monde », observe avec satisfaction le PDG.