Nouvelles révélations explosives dans l'affaire PR Maintenance, cette firme dont le PDG, Pierre Robitaille, s'est fait construire un petit château grâce à des fonds publics.

Pierre Robitaille aurait offert une commission secrète de 700 000$ au patron d'un fonds gouvernemental FIER (Fonds d'intervention économique régional) pour qu'il réussisse à faire effacer des dettes de 4 millions de dollars de son entreprise, selon un courriel déposé en cour.

Le patron en question est Alain Lambert. Il a été congédié en août par l'organisme gouvernemental qui gère les FIER, Investissement Québec. L'information sur la présumée commission provient d'un courriel transmis à Investissement Québec par le frère de Pierre Robitaille, Simon. Le courriel est daté du 30 août.

PR Maintenance est une firme d'entretien ménager de 3000 employés. Elle connaît des difficultés parce que son propriétaire, Pierre Robitaille, y a puisé 1,9 million pour rénover son chalet dans la région de Québec, est-il écrit dans un jugement. Le chalet comprend deux garages pouvant accueillir des hélicoptères et une piscine de très grand luxe.

Le courriel a été écrit après que Simon Robitaille a eu une conversation téléphonique et une rencontre avec son frère dans le contexte de la restructuration de l'entreprise. Simon Robitaille y explique avoir servi de prête-nom pour une entreprise de son frère, Location Morneau. Il a aussi cautionné personnellement l'emprunt de Location Morneau auprès du FIER, qui lui réclame maintenant 1,2 million.

Trois prêteurs devaient donner leur accord pour effacer les deux tiers de la dette de PR, soit environ 4 millions: le FIER d'Investissement Québec, la Banque de développement du Canada (BDC) et le fonds CPVC. Les deux organismes publics se sont vu offrir un remboursement d'environ 50% de leur dette, tandis que le remboursement offert pour CPVC n'était que de 28%.

Selon le courriel, Pierre Robitaille «a dit à Alain Lambert que s'il faisait accepter aux autres [de CPVC] que PR ne pourra jamais leur donner plus que 0,28 cent du dollar, qu'il va donner 700 000$ à Alain Lambert. Il semble heureux de ce qu'il est en train de faire. Quand je le rencontre, il me raconte les mêmes affaires. Il se vante qu'il est en train de conclure tout un deal qui va lui rapporter gros. Je ne considère pas ça comme un deal de fourrer autant de monde. Surtout le 700 000$ qu'il donne à Alain Lambert, ça ne sonne pas très bien à mes oreilles, mais moi, je ne connais rien des finances».

Alain Lambert est président et actionnaire de CPVC. Parmi les autres actionnaires de CPVC, on trouve deux hommes d'affaires fort connus, Robert Brown, PDG de CAE, et Chahram Bolouri, l'un des ex-présidents de Nortel.

Dans son courriel, Simon Robitaille ajoute: «Je ne pense pas que ce soit complètement légal dans tous les sens du terme d'offrir 700 000$ à Alain Lambert afin qu'il fasse accepter à la compagnie dont il est le président une offre ridicule envers des hommes qui t'ont passé de fortes sommes d'argent pour t'aider. En tout cas, même si c'est légal, ça en dit long.»

Simon Robitaille écrit qu'il a servi de prête-nom à son frère au cours des dernières années moyennant rétribution. Il s'est fait dire que PR connaîtrait un plus grand essor en créant Location Morneau à son nom, puisque Pierre Robitaille pouvait y transférer tous les équipements de PR servant au ménage et la dette afférente, embellissant du même coup les états financiers de PR et améliorant ses chances de financement.

Alain Lambert et Pierre Robitaille ont nié sous serment et devant le tribunal avoir discuté d'une commission secrète de 700 000$. M. Lambert n'a pas voulu répondre à nos questions, nous demandant de nous en remettre à son témoignage en cour. Pierre Robitaille n'a pas rappelé La Presse. Investissement Québec n'a pas voulu commenter la présumée commission.

L'entente sur l'effacement de la dette a été rejetée la semaine dernière, mais les parties continueraient de négocier. La BDC a en jeu un prêt de 2,8 millions fait par l'entremise du fonds Alterinvest II, auquel la Caisse de dépôt a contribué. Le FIER, financé à 66% par Investissement Québec, a pour sa part avancé 2,5 millions entre 2006 et 2008. La contribution de CPVC est de 1,4 million. PR compte parmi ses clients Loblaw, IGA, la SAQ et des organismes publics ou parapublics.