L'expansion canadienne amorce une accélération qui portera son rythme à près de 3% au cours des 12 prochains mois, prévoit la Banque du Canada.

Après un printemps anémique où la croissance aurait été contenue à 1,5% seulement, selon l'estimation des autorités monétaires, l'économie canadienne devrait progresser à 2,8% cet été et 2,9% au cours de l'automne et de l'hiver avant de ralentir doucement à 2,5% au cours des six mois suivants.

Dans son nouveau scénario contenu dans le Rapport sur la politique monétaire (RPM) publié hier, la Banque estime que les investissements des entreprises et la consommation seront les moteurs de l'économie. En avril, la Banque tablait sur un ralentissement de la consommation, mais elle se ravise en précisant que le revenu estimé des ménages avait été sous-estimé. Si ralentissement il y a, il surviendra à partir d'un sommet plus élevé, contribuant du coup à l'essor.

En revanche, le commerce extérieur freinera la croissance plus longtemps en raison de la croissance beaucoup plus faible qu'escomptée de l'économie américaine. La Banque la ramène de 3,0% à 2,4%, soit quatre dixièmes de moins que la canadienne.

La force du dollar canadien nuit en outre aux exportateurs, surtout les manufacturiers qui ne profitent pas de l'appréciation des produits de base. Le huard devrait s'échanger contre 103 cents US en moyenne durant la période de projection du RPM qui s'étend jusqu'en 2013.

Une monnaie forte agit en revanche comme un tampon sur les pressions inflationnistes exercées par les prix plus élevés des biens importés.

L'inflation, qui a pris de l'élan durant le printemps sous la poussée des prix de l'énergie et des denrées, devrait décélérer dès ce mois-ci. L'effet de l'entrée en vigueur de la taxe de vente harmonisée en Ontario et en Colombie-Britannique le 1er juillet 2010 aura disparu dans le calcul de la progression annuelle de l'Indice des prix à la consommation (IPC). Son augmentation annuelle devrait passer de 3,4% en moyenne au deuxième trimestre à 2,8% au cours du présent.

Au printemps prochain, l'inflation devrait retrouver sa cible de 2%.

Entre-temps, l'inflation de base (qui exclut les éléments les plus volatils de l'inflation totale comme l'essence ou les fruits et les légumes) aura atteint le rythme de 2% dès cette année, soit bien avant le retour de l'économie à son plein potentiel, prévu au printemps.

«La projection de la Banque intègre une réduction de la détente monétaire se réalisant au cours de la période de projection», précise-t-on dans le RPM.

On y plaide cependant que le taux directeur doit tenir compte de vents adverses susceptibles de freiner la croissance comme la faiblesse marquée des exportations. «Il est ainsi possible que le taux directeur ne retrouve son niveau de long terme qu'après le moment où devraient s'effectuer le retour de l'inflation à la cible de 2% et celui de la production à son potentiel.»

De 1992 à 2007, soit durant les 15 ans qui ont précédé l'accommodement monétaire historique encore largement en place, le taux directeur moyen s'élevait à 4,15%, selon les calculs de BMO Marchés des capitaux. Il faudrait désormais viser 3,5% environ, estime BMO, étant donné le plus faible potentiel de croissance et de l'écart accru entre le taux directeur et le taux préférentiel des banques. Cet écart est de 200 centièmes, soit 25 de plus qu'avant la crise financière.

«Étant donné le resserrement causé par les restrictions fiscales aux États-Unis [et au Canada] et de l'effet de la force du huard dans un avenir prévisible, la Banque ne sentira pas de sitôt l'urgence de rétablir son taux à un niveau neutre», estime Douglas Porter, économiste en chef délégué chez BMO.

Cela n'écarte pas une réduction prochaine de la détente monétaire, mais le taux directeur restera peu élevé longtemps encore.