La caisse de retraite des syndiqués de la CSN, Bâtirente, est à l'origine d'une coalition internationale d'investisseurs qui veulent enrayer le commerce illégal des armes.

Depuis quatre jours, les membres des Nations unies sont réunis à New York afin de poursuivre les discussions quant à la préparation du premier traité sur le commerce des armes. Une déclaration a été déposée dans ce sens hier par 21 firmes d'investissement dans le monde qui gèrent plus de 1200 milliards de dollars de capital.

Parmi celles-ci, la québécoise Bâtirente, qui prône l'investissement responsable et compte parmi ses rangs François Meloche, l'initiateur du traité.

«Être responsable est un bon investissement, soutient le gestionnaire, risques extra-financiers, de Bâtirente. Il y a un lien avec la performance financière. Des études montrent que ça n'a pas d'impact négatif.»

Le commerce illégal d'armes

Bâtirente et les autres firmes signataires (une américaine et 19 européennes) ont dans leur ligne de mire le commerce illégal d'armes.

«Des ONG, dont Oxam, soutiennent qu'un des gros problèmes dans les pays émergents est la prolifération d'armes légères, explique François Meloche. Le fait qu'il n'y ait pas de contrôle accentue l'insécurité, le potentiel de conflits et les problèmes économiques. Nous, comme investisseurs, on a intérêt à ce que l'économie mondiale se porte bien.»

Les entreprises qui s'établissent dans de tels pays risquent alors d'être moins rentables. «L'absence d'un traité génère des risques pour nos portefeuilles, ajoute François Meloche. Ça accroît les chances que les entreprises qui pourraient être dans notre portefeuille soient complices d'acheteurs qui violent les droits humains.»

Bâtirente ne part pas de zéro. «Il y a une panoplie d'accords régionaux, dit François Meloche. Les pays sont sur des listes diverses et soumis à des critères différents. Par exemple, Rolls-Royce, qui fabrique des moteurs militaires, se trouve dans 30 pays et chacun a ses normes. Le but est que tous les pays soient coordonnés. Il faut dire d'une même voix qu'on ne vend pas à des tyrans, à des armées qui commettent des gestes répréhensibles. Avoir un traité va permettre une transparence, savoir où les armes s'en vont. Va permettre qu'on s'entende tous sur des critères de base.»

Question de réputation

Pour l'instant, il est impossible de mesurer l'impact sur le rendement des pratiques d'investissement responsable, ni les pertes subies lorsqu'on appuie une entreprise implantée dans un pays instable, selon François Meloche.

«C'est intangible tout ça, affirme-t-il. On ne met jamais de chiffres sur la réputation d'une entreprise. Mais avec une bonne réputation, une entreprise est plus susceptible d'être reçue par les gouvernements et d'attirer dans ses rangs de bons candidats. Les banques ont aussi de plus en plus de politiques. La Société financière internationale, bras financier de la Banque mondiale, vient de rehausser ses normes.»

L'ONU en est à son troisième comité préparatoire en un an et demi. On devrait connaître en juin 2012 les conclusions des rencontres. Arrivera-t-on à quelque chose de significatif? «Oui, mais il y a encore des dangers qu'il y ait de la dilution par certains pays, répond François Meloche. Certains ne veulent pas faire embarquer tous types d'armes dans le traité. Au cours de la dernière rencontre, les positions divergeaient entre l'Europe, la Russie, la Chine et Israël.»