Le baron de la presse Rupert Murdoch est arrivé dimanche à Londres afin de tenter de déminer le scandale des écoutes téléphoniques, qui a déjà provoqué la fermeture d'un de ses titres phares, le News of the World, dont la dernière édition titre: «Merci et adieu».

Le magnat australo-américain, toujours fermement aux commandes de son empire malgré ses 80 ans, «est arrivé à Londres», a indiqué à l'AFP une source au sein de News International, la société regroupant les opérations britanniques de Murdoch.

L'homme fort de News Corp, empire médiatique transcontinental, a fait le voyage des États-Unis afin de gérer lui-même la crise profonde qui a déjà fait disparaître le tabloïd The News of the World (NotW), plus fort tirage de la presse britannique.

Le NotW est accusé d'avoir piraté les messageries téléphoniques de milliers de célébrités et de victimes de crimes, dont une écolière assassinée, et d'avoir payé des policiers-informateurs pour alimenter ses scoops sulfureux.

Scotland Yard a longuement interrogé vendredi trois personnes, dont un ancien rédacteur en chef du journal, Andy Coulson, qui fut également directeur de la communication du Premier ministre David Cameron. Rebekah Brooks, la directrice générale de News International, devrait elle aussi être prochainement entendue, selon la presse.

M. Murdoch devait tenter d'empêcher que le scandale éclabousse la marque News Corp. Le NotW ne représente qu'une goutte d'eau dans cette nébuleuse médiatique mais le scandale menace un projet-phare de Murdoch au Royaume-Uni: le rachat controversé de la totalité du bouquet de chaînes par satellite BSkyB, dont News Corp possède déjà 39%.

Le contrôle de la totalité de BSkyB placerait Murdoch dans une position ultra-dominante, soulignent les nombreux opposants au projet.

David Cameron a laissé entrevoir, vendredi, un report de la décision gouvernementale à ce sujet (probablement à l'automne).

Dimanche, le leader de l'opposition travailliste Ed Miliband a exigé qu'aucun accord ne soit donné au rachat, tant que se poursuivra l'enquête sur le NotW. Le Labour serait prêt à déposer une motion de censure si un feu vert était donné actuellement, a-t-il menacé.

Simon Hughes, le numéro deux des libéraux-démocrates, partenaires clefs de la coalition au pouvoir, a également exigé un report de la décision.

Rupert Murdoch devrait également avoir à épauler son fils James, qui dirige les opérations européennes et asiatiques de News Corp, et donc celles au Royaume-Uni.

David Cameron a estimé vendredi que la police devait interroger toutes les personnes concernées, quelle que soit leur position.

Dans la voiture qui le conduisait au siège de sa société britannique, Rupert Murdoch est apparu sur des images de télévision lisant le News of the World, dont la dernière Une était barrée d'un grand: «Merci et adieu».

Dans un ultime baroud d'honneur, le journal dominical a consacré son édition à un pot-pourri de ses plus gros succès de vente, dans une sorte de florilège de la presse de caniveau. S'étalent ainsi sur un encart central de 48 pages 168 ans de scoops sulfureux: «l'enfant caché» du tennisman Boris Becker; les affaires extra-maritales du footballeur David Beckham; la liste, avec leur domicile, des «pervers sexuels» (des condamnés ayant purgé leur peine)...

«Nous avons fait l'Histoire», assure sans modestie le tabloïd qui se présente en Une comme «le meilleur journal au monde».

Pour cette «édition-souvenir», cinq millions d'exemplaires ont été imprimés, soit près du double du tirage normal. Dans un éditorial couvrant une page entière, le NotW reconnaît cependant «s'être perdu», en référence au scandale des écoutes.