La bisbille entre TELUS, Bell, Shaw et Quebecor au sujet du partage des contenus télévisuels est loin d'être réglée.

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Au cours de la dernière année, une vague d'intégrations verticales a balayé le secteur canadien des télécoms avec le rachat de CTVglobemedia par Bel [[|ticker sym='T.BCE'|]]l, puis celui de Canwest Global par Shaw [[|ticker sym='T.SJR.B'|]]. Parmi les plus grands acteurs de l'industrie, seul TELUS [[|ticker sym='T.T'|]] ne possède pas de filiale télévisuelle.

Inquiet, TELUS a pressé hier le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) d'adopter des mesures pour prévenir les «abus de pouvoir de marché» de la part de ses concurrents.

«TELUS craint que la concurrence soit diminuée parce que l'intégration verticale crée toutes sortes d'incitatifs, pour une entreprise intégrée, de mettre en place des mesures anticompétitives», a fait valoir à La Presse Affaires Ann Mainville-Neeson, directrice en matière de réglementation de la radiodiffusion chez TELUS.

Le CRTC tiendra en juin des audiences sur la question de l'intégration verticale, et les groupes de télécoms avaient jusqu'à hier pour déposer leurs mémoires. TELUS, qui a présenté un document d'une soixantaine de pages, s'inquiète au plus haut point des ententes d'exclusivité qui pourraient l'empêcher de diffuser des émissions offertes par ses concurrents.

La société de Vancouver a déjà porté plainte en juin 2010 contre Quebecor [[|ticker sym='T.QBR.B'|]], qui refuse de partager le contenu de TVA en vidéo sur demande, offert exclusivement aux abonnés Illico de sa filiale Vidéotron. Le CRTC a donné raison à TELUS et Bell (qui portait plainte conjointement) en janvier dernier, mais l'affaire n'est toujours pas réglée.

Raison de plus, selon TELUS, pour que le CRTC crée des règles préventives afin d'empêcher tout fournisseur de refuser du contenu à ses concurrents. Surtout en cette époque où les émissions sont de plus en plus regardées sur les téléphones intelligents.

Les consommateurs «ne veulent pas être obligés d'avoir un téléphone de Bell, un autre de Vidéotron et un autre de TELUS juste pour avoir accès aux contenus offerts exclusivement par chacun», a fait valoir Ann Mainville-Neeson.

Avis divergents

Quebecor, qui possède le câblodistributeur Vidéotron et le réseau TVA depuis 2001, ne voit pas du tout les choses du même oeil. Dans son mémoire déposé hier au CRTC, le groupe insiste que le Conseil devrait «laisser libre cours aux forces du marché» et jouer un rôle de «surveillant», plutôt que de créer une série de nouveaux règlements contraignants.

«Il est certain qu'une interdiction de toute forme d'exclusivité de contenu sur les différentes plateformes représenterait un véritable frein au maintien et au développement du système de radiodiffusion canadien, d'autant plus que l'exclusivité est déjà pratiquée sur de nombreux canaux de diffusion», fait valoir Quebecor dans son mémoire.

Selon l'entreprise, «des règles interdisant l'exclusivité seraient complètement inutiles et viendraient alourdir le dispositif règlementaire actuel qui contient déjà des dispositions relatives aux préférences et désavantages indus».

Bell Canada, qui fait l'objet d'une plainte de TELUS devant le CRTC, s'oppose elle aussi à la restriction des ententes d'exclusivité par l'organisme fédéral. L'entreprise montréalaise a déposé hier un volumineux rapport au Conseil.

«Dans la pratique, il est très difficile pour toute société d'obtenir les droits de distribution de tous les contenus sur toutes les plateformes, écrit Bell. Ainsi, l'exclusivité sur une plateforme de distribution n'empêche pas sa distribution non exclusive sur d'autres plateformes.»

Le conglomérat fait aussi valoir que très peu d'exemples de comportements anticoncurrentiels ont été relevés au Canada, même si l'intégration verticale y est pratiquée à une certaine échelle depuis 10 ans. «Il n'y a absolument aucune raison de présumer que l'intégration verticale ira à l'encontre des objectifs de la Loi.»

Les audiences du CRTC auront lieu le 20 juin prochain à Gatineau. Outre les grandes sociétés de télécoms, plusieurs intervenants, dont la chaîne V, TV5, l'Association des producteurs de films et de télévision du Québec et la SOCAN, ont déposé des mémoires.

Le porte-parole du CRTC n'a pas rappelé La Presse Affaires, hier.