Au fil des gazouillis, la valeur de Twitter a augmenté de façon exponentielle depuis cinq ans. Seulement depuis 12 mois, la hausse serait de 926%. Pas étonnant que plusieurs experts du milieu financier voient dans le site de microblogage les signes d'une deuxième bulle internet à l'horizon.

«Les attentes financières envers Twitter sont énormes, dit le professeur Julian Yeo, professeur et spécialiste en évaluation boursière à l'Université Columbia, à New York. Les investisseurs doivent être prudents et se rappeler les leçons de la bulle techno, qui pourrait se répéter.»

Comme Twitter n'est pas inscrit en Bourse, il ne dévoile ni ses revenus ni ses profits. Sa valeur financière n'est connue que de ses actionnaires au fil de transactions privées. Quand Twitter a accueilli de nouveaux investisseurs, en décembre, l'entreprise était évaluée à 3,7 milliardsde dollars américains aux fins de la transaction de 200 millions.

Le mois dernier, une transaction avec JPMorgan Chase niée par la direction de Twitter aurait évalué le site de microblogage à 4,5 milliards de dollars. SharesPost, un marché secondaire d'actions non inscrites à la Bourse, calcule la valeur actuelle de Twitter à 7,7 milliards de dollars, comparativement à 750 millions en mars 2010. Il s'agit d'une hausse annuelle de 926%.

Professeur en comptabilité à l'Université Stanford, Charles Lee, qui a été directeur de Barclays Global Investors de 2004 à 2008, a plusieurs interrogations sur le plan d'affaires du neuvième site web au monde par sa popularité, avec 200 millions d'abonnés. «Twitter est justement une entreprise dans laquelle je n'aurais pas investi, dit cet Ontarien diplômé de l'Université McGill. Comme beaucoup d'entreprises web avant elle, Twitter décide d'abord d'être partout et ensuite de générer des revenus. Selon cette philosophie, on trouve toujours une façon de faire de l'argent si on a un auditoire important. La recette a déjà fonctionné pour Google, mais je suis plutôt vieux jeu: je préfère des états financiers solides à une entreprise à la mode.»

Les revenus annuels de Twitter devraient passer de 50 à 150 millions cette année et atteindre 250 millions de dollars en 2012, selon eMarketer. Le cofondateur de Twitter, Biz Stone, assure que l'entreprise fait déjà des profits, notamment en vendant des liens commandités sur les comptes de ses abonnés. «Son défi, c'est de transformer sa popularité en profits», dit Julian Yeo, de l'Université Columbia.

S'il ne faut que quelques minutes pour faire partie de la twittosphère, en devenir actionnaire est une autre histoire. Quand Twitter a besoin de capitaux, il fait affaire avec des institutions financières et des investisseurs technos, et non avec le commun des mortels. «La rareté des actions fait monter leur valeur, dit Julian Yeo, de l'Université Columbia. C'est un club exclusif et il faut être branché pour investir.»

Selon Biz Stone, Twitter ne s'inscrira pas de sitôt à la Bourse. «Nous avons tellement de choses à faire avant ça. Nous n'en discutons même pas à l'interne. C'est trop loin», a-t-il dit au début du mois lors d'un voyage à Séoul, en Corée du Sud.