La perte de compétitivité des entreprises canadiennes leur fait perdre d'importantes parts de marché aux États-Unis au bénéfice de la Chine, en particulier depuis 2005. D'autres pays comme le Mexique sont aussi parvenus à gagner du terrain.

De 2000 à 2010, la part des importations américaines en provenance du Canada est passée de 20% à 14%. Celle de la Chine, de 8% à 19%.

L'appréciation du dollar canadien est le grand responsable, lui qui est parti d'un peu plus de 60 cents d'équivalence avec le billet vert pour se hisser à la parité durant la période.

La faible productivité des entreprises y est aussi pour quelque chose, a rappelé Tiff Macklem, premier sous-gouverneur de la Banque du Canada. «Une monnaie faible n'est pas une stratégie d'affaires, a-t-il martelé au cours de deux conférences prononcées en Alberta. Les entreprises doivent investir et faire en sorte que ces investissements se traduisent par une baisse des coûts unitaires de main-d'oeuvre (CUMO) et une amélioration de la compétitivité.»

Durant la dernière décennie, les salaires ont évolué de manière similaire des deux côtés de la frontière. Ils ne sont pas responsables de l'écart qui s'est creusé dans les CUMO.

L'augmentation de la compétitivité passe donc par l'investissement, l'innovation et l'embauche de travailleurs plus scolarisés. À ces enseignes, les entreprises canadiennes ont pris beaucoup de retard, a démontré M. Macklem.

De 1987 à 2009, les investissements canadiens par travailleur dans les machines et le matériel ainsi que dans les technologies de l'information et des communications (TIC) représentaient en moyenne 77% et 59% de ceux consentis par les États-Unis. Avec pour résultat que le travailleur américain était deux fois plus équipé que le canadien en 2009, pour une tâche semblable.

En R&D, le Canada se classe 17e parmi les pays de l'OCDE. En innovation, il fait aussi partie de la queue du peloton.

Même si la main-d'oeuvre est instruite, «les entreprises canadiennes accusent un retard dans le nombre de titulaires de doctorat et d'autres diplômes de deuxième et troisième cycles, surtout dans les sciences, le génie et les affaires», déplore M. Macklem qui enjoint les entreprises à considérer davantage l'enseignement supérieur.

Il a rappelé que les investissements privés ont chuté de 25% durant la dernière récession et ils se situent encore à 15% en deçà de ce qu'ils étaient juste avant. «Il est probable que le Canada profitera moins de la hausse de la demande mondiale que lors des reprises précédentes en raison de ses problèmes de compétitivité», a prévenu le premier sous-gouverneur.

Cette affirmation a fait sourciller Yanick Desnoyers, économiste en chef à la Banque Nationale. Depuis trois ans, observe-t-il, le secteur manufacturier canadien réalise les mêmes gains de productivité que l'américain. C'est la productivité de l'ensemble des entreprises qui accuse un retard. Par conséquent, une croissance plus forte de l'économie américaine représente certainement des opportunités pour les exportateurs canadiens d'autant plus que leur bilan financier est très sain dans l'ensemble.

La Banque du Canada observe un rattrapage en matière d'investissements depuis deux semestres. Elle s'attend à ce que cette tendance se poursuive.

Signes encourageants, l'indice de confiance des entreprises du Conference Board a atteint un sommet de six ans au quatrième trimestre. L'organisme de recherches précise qu'elles ont l'intention d'investir pour accroître leur productivité.