Elles carburent au risque et aux nouvelles idées. Elles veulent révolutionner les technologies vertes, l'internet, les biotechnologies. Par leurs échecs et leurs succès, les entreprises en démarrage du Québec bâtissent l'économie du savoir. Chaque lundi, La Presse Affaires vous présente des acteurs, des technologies et des enjeux liés à l'innovation et à son financement.

Des gazouillis insignifiants, ce qui circule sur Facebook et sur Twitter? En grande partie, reconnaissent les gars de Needium. Sauf qu'eux ont fait le pari que dans ce fouillis se cachent des pépites d'or. Et ils se sont mis en tête de les extirper.

Rue Sainte-Catherine, dans un loft grand comme un appartement, une dizaine de jeunes penchés sur des écrans planchent justement à repérer ces pépites. Sur les murs, des feuilles couvertes d'algorithmes témoignent de la complexité de l'opération.

«Ça fait quatre ans qu'on travaille sur notre idée. À un moment donné, on s'est dit: go! On construit la technologie, on conçoit les produits. Notre but est de bâtir une entreprise internet de calibre international à Montréal», raconte Sylvain Carle, cofondateur de cette boîte aussi connue sous le nom de Praized Media, mais qui est en plein changement de marque pour refléter sa nouvelle orientation.

En jeans et en t-shirt, cheveux longs et barbichette, Sylvain Carle est le cerveau technologique derrière Needium. L'idée de départ, elle, a germé dans la tête de Sébastien Provencher, son acolyte et ancien responsable de la stratégie internet au Groupe Pages Jaunes.

Ce que cherche Needium dans l'immense flot d'information généré par les réseaux sociaux comme Facebook et Twitter est simple: des gens qui expriment des besoins.

«Des besoins, les gens en expriment chaque seconde sur les réseaux sociaux, dit Sylvain Carle. Ça peut être des besoins explicites, comme: je cherche un restaurant pour bruncher dimanche. Ou ça peut être implicite. Comme: j'ai faim. Ou: je vais me marier l'an prochain.»

Pour Needium, chaque internaute qui manifeste un besoin est un consommateur potentiel. La force de l'entreprise est d'abord de les détecter, puis de les localiser. Il ne reste ensuite aux marchands locaux qu'à sauter dans la mêlée.

Un exemple: Montréal Poutine, resto du Vieux-Montréal, est un client de Needium. La société lui a créé des comptes Facebook et Twitter et s'occupe de les gérer contre des frais mensuels.

«Si on détecte quelqu'un qui dit: «J'ai le goût d'une poutine» -et les gens disent ça tout le temps sur Twitter!-, on intervient et on leur dit: «Si vous êtes près du Vieux-Port, venez nous voir!»» illustre Sylvain Carle.

Voitures, hôtels, restaurants: la liste des biens et services qui peuvent ainsi être offerts de façon ciblée, directement aux gens qui manifestent le désir de les obtenir, est presque infinie.

L'art de pivoter

Au départ, les fondateurs avaient créé leur propre plateforme web sur laquelle les consommateurs devaient se rendre pour échanger sur les commerces de leur entourage.

Mais devant la montée de Facebook et Twitter, ils ont compris qu'il fallait faire ce que les entreprises en démarrage appellent un «pivot» -un changement d'orientation.

«On a réalisé qu'au lieu de créer des plateformes pour recueillir du contenu, il fallait aller chercher ce contenu là où il se trouvait déjà, donc sur les réseaux sociaux», explique Sébastien Provencher.

C'était la naissance de leur nouvelle technologie, Needium (pour Need Medium), un nom qui deviendra bientôt l'appellation officielle de l'entreprise.

Entre-temps, les jeunes entrepreneurs ont aussi dû se frotter au grand défi de toute petite entreprise qui veut réaliser de grandes idées: dénicher du financement.

Cap sur Silicon Valley

Sylvain Carle et Sébastien Provencher ont rencontré des investisseurs québécois avant de mettre le cap sur la Silicon Valley, en Californie, Mecque mondiale de la techno.

«Dès le départ, on a voulu se frotter au monde californien pour vérifier si notre idée était de classe mondiale. La réaction a été incroyable. À mon avis, c'est ce qui a permis d'éveiller l'intérêt des investisseurs d'ici», dit Sébastien Provencher.

C'est finalement Garage Technology Ventures Canada, fonds de capital-risque québécois devenu depuis Capital St-Laurent, qui a misé sur la boîte - d'abord 1 million de dollars, puis 1,5 million supplémentaire.

Capital St-Laurent a aussi mis les fondateurs en contact avec Peter Diedrich, entrepreneur et gestionnaire d'expérience qui a pris les rênes de l'entreprise.

«On avait besoin des compétences de Peter pour nous amener au prochain niveau. L'une des choses importantes, quand on lance une entreprise, c'est de savoir quand on a besoin d'aide et l'accepter», souligne Sébastien Provencher.

M. Diedrich a lancé une équipe de ventes pour présenter Needium aux marchands. Le président a aussi signé des ententes pour vendre la technologie à des partenaires à l'étranger, qui s'occupent de recruter les marchands locaux.

En plus de Montréal, Needium est aujourd'hui offert à Calgary, Moncton, Boston, San Francisco, Austin, Londres et Paris. L'objectif est aussi clair qu'ambitieux: conquérir le monde.

Needium/Praized Media

Fondateurs: Sébastien Provencher et Sylvain Carle Président: Peter Diedrich Investisseurs: Capital St-Laurent Le concept en 140 caractères: «Needium permet aux PME de capitaliser sur les occasions d'affaires locales dans les médias sociaux en y identifiant les besoins exprimés.» (Signé Sébastien Provencher) Objectif d'ici un an: Atteindre le seuil de rentabilité.