Après une expansion contenue à 2,3% en rythme annualisé durant l'automne, la Banque du Canada estime que la cadence passe à 2,5% cet hiver et se rendra jusqu'à 3% en seconde moitié d'année.

Au net, la dernière mouture du Rapport sur la politique monétaire (RPM), révise à la baisse comme prévu la croissance de 2010 (2,9% au lieu de 3%) et porte à 2,4% (au lieu de 2,3%) celle de cette année. En 2012, l'expansion est révisée aussi un peu à la hausse, de 2,6% à 2,8%.

Bien que les autorités monétaires soulignent avoir tenu compte dans leur scénario précédent (en octobre) d'un stimulus fiscal et monétaire américain alors à venir, elles révisent sensiblement à la hausse leurs projections de croissance chez l'Oncle Sam pour l'année en cours.

Elle précise que l'effet positif pour le Canada sera limité à 0,2 point de pourcentage seulement.

L'économie canadienne accélère désormais le rythme de sa croissance qui avait montré d'inquiétants signes d'essoufflement depuis le printemps.

Cela s'explique par le fait que le stimulus devrait surtout augmenter les dépenses de consommation. Or, lit-on dans le RPM, «les exportations canadiennes étant principalement constituées des produits de base non énergétiques et de biens d'équipement, elles sont plus sensibles aux variations des dépenses d'investissement américaines qu'à celles des dépenses de consommation.»

Et même pour ce type d'exportations, le Canada joue un peu de malchance. Il s'est spécialisé dans les expéditions de véhicules, de pièces d'auto et de matériaux de construction, les deux industries les plus frappées aux États-Unis par la récession.

Sans compter que l'appréciation du dollar canadien est le grand responsable de l'augmentation des coûts unitaires de main-d'oeuvre (CUMO) plus rapide de ce côté-ci de la frontière.

Depuis plusieurs années déjà, la Banque s'inquiète de la perte de compétitivité des entreprises canadiennes sur les marchés mondiaux. Dans le RPM, elle consacre une note technique sur le sujet. Les salaires ne sont pas en cause. Outre le taux de change responsable des deux tiers de l'écart de 31% qui s'est creusé face aux CUMO aux Etats-Unis, les faibles gains de productivité sont à pointer du doigt. Cela relève d'une piètre organisation du travail. «Cela va entraver la compétitivité des exportations canadiennes et limiter les effets positifs de la reprise américaine au Canada», estime Derek Holt, économiste chez Scotia Capitaux.

La Banque déplore d'ailleurs que «moins de la moitié du recul inhabituellement marqué» des investissements des entreprises accusé durant la récession a été comblée. Cela tranche avec le retour à l'expansion des dépenses de consommation ou du nombre d'emplois.

Pas étonnant dès lors que les exportations nettes freinent la croissance depuis le printemps au point où la balance courante du pays affichait durant l'été un déficit équivalent à 4,3% du PIB, du jamais vu en 20 ans.

Heureusement, les entreprises profitent des conditions très avantageuses de crédit pour rattraper le temps perdu. Leurs investissements devraient assurer 1,1 point de pourcentage à la croissance en 2011, soit presque autant que la consommation (1,4%).

Cela entraînera une contribution légèrement positive (0,1) du commerce extérieur qui avait à lui seul retranché 2,3 points au PIB en 2010, estime la Banque.

Les perspectives d'inflation demeurent très ténues. Ce n'est pas avant la fin 2012 que l'inflation de base (sans composantes volatiles ni effet des taxes indirectes) rejoindra la cible de 2%.

Évidemment, cela suppose que «la Banque intègre une réduction de la détente monétaire se réalisant progressivement au cours de la période de projection».

Le taux cible de financement à un jour a été reconduit à 1% pour la troisième fois d'affilée mardi et tout indique qu'il en sera ainsi aussi lors de sa prochaine fixation, le 1er mars.