Intel (INTC) et Microsoft (MSFT) sont associés depuis si longtemps que le terme Wintel, qualifiant les PC animés par Windows et un processeur Intel, est devenu une expression courante des technos. Elle pourrait l'être un peu moins au cours des prochaines années, puisque les deux multinationales suivent présentement des tendances diamétralement opposées.

Du côté d'Intel, la présentation d'une nouvelle génération de processeurs, appelée Sandy Bridge, témoigne à nouveau de la pertinence de la fameuse loi de Moore sur la rapidité de la progression de la miniaturisation des composants informatiques. Une seule puce de ces nouveaux processeurs possède pas moins de 1,16 milliard de transistors. C'est suffisant pour traiter des heures d'images en haute définition en quelques minutes à peine, pour produire en temps réel une version virtuelle d'un utilisateur qui reproduit tous ses gestes à l'écran, ou pour faire une foule d'applications de pointe exigeant le traitement intensif d'un nombre important de données.

Bref, c'est tout ce que les analystes craignaient qu'Intel ne pourrait pas faire avec Sandy Bridge. Les prétentions de Paul Otellini, PDG du fabricant californien, sont que ces nouveaux processeurs - il y en a 20 au total - ne représenteront pas moins du tiers du chiffre d'affaires de sa société dès 2011. Les 500 nouveaux modèles d'ordinateurs personnels qui seront lancés en cours d'année par les fabricants de PC suffiront à faire croître les ventes d'ordinateurs au-delà des ventes de 2010, qui ont elles-mêmes surpris les analystes. «Cette année seulement, ces nouveaux produits vont générer des revenus de 125 milliards de dollars pour l'industrie informatique. Ça en fait sans conteste la nouveauté la plus importante en 2011 pour tout le secteur technologique», a affirmé M. Otellini lors d'une allocution plus tôt cette semaine.

Les analystes, eux, demeurent sceptiques. «Intel est persuadé que ces nouveaux processeurs stimuleront la demande tôt en 2011, mais on ne trouve aucune preuve que les acheteurs l'attendent avec une quelconque impatience, ou qu'ils ont retardé l'achat d'un PC neuf jusqu'à leur mise en marché», note Christopher Danely, de JP Morgan. Selon lui, les ventes seront au ralenti au fil des prochains mois, comme c'est normalement le cas en début d'année.

Le monde à l'envers

Ce n'est apparemment pas Microsoft qui va aider Intel, ses visées étant plutôt à l'autre bout du spectre de l'informatique personnelle. Son objectif à très court terme est de rendre son logiciel Windows assez léger pour qu'il puisse être installé sur les appareils les moins puissants sur le marché, animés par des processeurs mobiles de sociétés comme ARM, Nvidia et Qualcomm.

Ce que Microsoft voit, c'est une tendance forte du côté des circuits intégrés sur une seule puce, appelés System on a chip (SoC), en anglais. Elle pense aux ordinateurs ultraportables, aux tablettes numériques et à une nouvelle génération de téléphones mobiles, certains des marchés qui connaissent la plus forte croissance à l'heure actuelle dans le secteur informatique.

«La puissance des ordinateurs personnels s'est accrue régulièrement à chaque nouvelle génération de Windows. Ç'a changé avec Windows 7. La prochaine version de notre logiciel doit être adaptable à des appareils ayant une fiche technique qui ne sera pas nécessairement plus costaude que celle des modèles précédents», indique Steven Sinofsky, directeur de la division Windows chez Microsoft.

C'est un raisonnement à l'opposé de celui d'Intel, même s'il tire son origine du même phénomène: avec 66% du marché en 2011, ce sont les consommateurs, et non plus les entreprises, qui dictent l'évolution du PC. Leurs besoins sont manifestement plus variés. Microsoft estime qu'ils privilégieront des appareils aux capacités plus modestes, mais à un prix plus abordable. Intel pense plutôt qu'ils voudront vivre à plein l'époque numérique: vidéo HD, jeux vidéo de pointe, etc.

Lequel des deux a raison? Impossible à déterminer. Même les analystes ne s'entendent pas sur les tendances qui feront évoluer ce secteur dans les mois à venir.