Bell a hâte de conclure l'achat de CTV, TSN et RDS. Même s'il se comporte un peu comme un consommateur qui veut acheter une maison, mais qui demande d'être exempté des droits de mutation.

> Suivez Vincent Brousseau-Pouliot sur Twitter

BCE a annoncé jeudi dernier qu'il demandera au Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) de ne pas payer de «bénéfices tangibles» pour acheter les chaînes de télé et de radio de CTVglobemedia. Ces bénéfices sont à l'achat d'un réseau de télé ce que les droits de mutation sont à l'achat d'une maison.

Pourquoi le CRTC demande-t-il ces bénéfices à l'acheteur? Au moment de la vente d'un réseau de télé, l'organisme fédéral reprend techniquement la licence du vendeur pour la remettre à l'acheteur. S'il tenait une vente aux enchères, le CRTC obtiendrait une somme pour cette licence. Quand le CRTC approuve une transaction entre deux parties sans organiser d'enchères, il demande à l'acheteur une compensation, généralement établie à 10% de la valeur de la transaction pour un réseau de télé et à 6% pour une station de radio. Ces «bénéfices tangibles» doivent servir au rayonnement du petit écran.

Bell estime avoir déjà acquitté la facture quand l'entreprise a acheté CTVglobemedia en 2000. Bell a alors payé 320 millions de dollars en bénéfices tangibles en 7 ans. En 2006, Bell a réduit sa participation dans CTVglobemedia à 15%. «Nous avons déjà payé ces bénéfices quand nous avons acheté CTV en 2000, dit Mirko Bibic, chef des affaires réglementaires de Bell. Depuis 2000, nous avons toujours détenu des parts de CTVglobemedia, même si nous avons dilué notre participation en 2006.»

D'une valeur de 1,3 milliard de dollars, la transaction Bell-CTV a été annoncée en septembre dernier. Bell rachète les parts du holding de la famille Thomson (Woodbridge) et du régime de retraite Teachers'. Le CRTC, qui doit donner son approbation à la transaction, l'étudiera au cours des audiences publiques, le 8 février prochain. L'organisme fédéral se penchera notamment sur la demande d'exemption de Bell.

Le CRTC a déjà demandé à Bell un plan pour dépenser ses bénéfices tangibles advenant un refus de sa part. «Nous défendrons nos arguments de façon vigoureuse, mais ce n'est pas un dossier que nous pensons mener devant les tribunaux (en cas d'échec devant le CRTC)», dit Mirko Bibic.

S'il ne convainc pas le CRTC de lui accorder une exemption, Bell a offert un plan de 230 millions sur 7 ans. Ce plan comprend notamment 40 millions de dollars pour des dépenses de programmation à CTVglobemedia, 11 millions pour offrir le satellite dans des régions non obligatoires, 84 millions pour offrir des réseaux de télé locaux par satellite, 25 millions pour la conversion à la haute définition, 15 millions pour une nouvelle plateforme de distribution en ligne afin de contrer le piratage et 19 millions pour la programmation locale et émergente à la radio.

Le CRTC impose normalement des bénéfices tangibles équivalents à 10% de la valeur de la transaction. Pour l'achat de CTVglobemedia à 1,3 milliard, les bénéfices seraient ainsi de 130 millions. Le pourcentage des bénéfices peut varier selon la rentabilité des réseaux. À titre d'exemple, le CRTC a imposé des bénéfices à la baisse de 180 millions de dollars à Shaw pour l'achat de 2,1 milliards de dollars des réseaux de télé en faillite de Canwest, dont Global.