Une année de croissance sur le marché du travail de Montréal a pris fin de façon abrupte, le mois dernier. Près de 13 000 emplois ont disparu dans la métropole entre août et septembre, selon des données de l'Institut de la statistique du Québec (ISQ) qui doivent toutefois être interprétées avec prudence, selon les experts consultés hier.

La dernière Enquête sur la population active de Statistique Canada, publiée vendredi dernier, dressait un portrait flatteur du marché du travail de la province. Elle faisait état de 15 200 nouveaux emplois à temps plein au cours du dernier mois, ainsi que d'un taux de chômage de 7,7%.

Mais les données par région de l'ISQ démontrent que, dans la métropole, le nombre d'emplois a chuté pour la première fois depuis septembre 2009. En tout, 952 200 emplois ont été enregistrés le mois dernier dans l'île de Montréal, 12 700 de moins qu'en août. C'est un recul de 1,3%.

«Il y a certainement une fragilité, convient Richard Deschamps, qui est responsable du développement économique au comité exécutif, l'équivalent municipal du conseil des ministres. On ne peut pas dire que c'est une reprise avec une solidité à toute épreuve.»

Mais les chiffres doivent être mis en contexte, poursuit-il. Malgré le recul du mois dernier, 51 000 emplois ont été créés dans l'agglomération depuis un an. En août, on en comptait près de 965 000 dans l'île de Montréal, un sommet historique.

«Il faut être très prudent dans l'interprétation des chiffres, indique M. Deschamps. On ne peut pas dire que c'est une tendance lourde sur plusieurs mois. Ce n'est pas une dégringolade.»

La manière dont les statistiques régionales sur l'emploi sont calculées incite d'ailleurs certains experts à prendre les données avec un grain de sel. Pour produire des données sur Montréal, l'ISQ mène des sondages auprès d'un petit échantillon qui change d'un mois à l'autre. Il y a donc une marge d'erreur importante, souligne André Grenier, économiste et spécialiste du marché du travail à Emploi-Québec.

«La marge d'erreur, à Montréal, c'est entre 18 000 et 19 000 pour le nombre total d'emplois, explique-t-il. La variation est donc à l'intérieur de la marge d'erreur.»

M. Deschamps ignore les causes du recul enregistré le mois dernier. Mais l'économiste principale au Mouvement Desjardins, Joëlle Noreau, souligne que le nombre d'emplois a reculé dans le secteur scientifique et technique, qui comprend les ingénieurs, les avocats et les comptables. C'est peut-être le signe que les grands travaux d'infrastructure lancés pendant la récession pourraient tirer à leur fin, avance-t-elle.

«On sait qu'il y a moins de gros travaux qui nécessitent un travail de préparation, indique-t-elle. On est beaucoup dans la réalisation de ces travaux. Donc, il a pu y avoir une baisse des embauches dans ces firmes.»

Montréal n'est pas seul

Mme Noreau fait valoir que la métropole n'est pas la seule région à observer un recul de l'emploi: 3700 emplois ont été perdus à Laval, selon la même enquête. L'Outaouais, Chaudière-Appalaches et le Saguenay-Lac-Saint-Jean ont aussi vu des emplois disparaître.

«Au Québec, il y a eu deux reculs de l'emploi en un an, indique-t-elle. Et chaque fois, Montréal a été épargnée.»