Marcela Branco rentrait de vacances lorsqu'elle a sursauté à la lecture des journaux.  Pueri Domus, la société d'enseignement privé pour laquelle elle travaille depuis sept ans, venait d'être vendue avec son propriétaire Sistema Educacional Brasileiro (SEB) au groupe d'édition Pearson contre la somme de 540 millions de dollars CAN.

« C'est la deuxième fois en un an que mon entreprise change de mains », s'est étonnée l'enseignante de 37 ans, originaire de Sao Paulo.

Quelques jours plus tôt, c'était au tour de la société Anglo, spécialisée dans l'édition de matériel éducatif, les cours pré-universitaires et la formation professionnelle, d'être rachetée contre 240 millions dollars CAN par le groupe Abril Educaçao.

Ces transactions confirment l'intérêt manifesté par des fonds d'investissement privés comme KKR et Advent International, qui ont misé des milliards au Brésil depuis 2007 pour s'emparer d'institutions d'enseignement privé comme Kroton, qui compte 86 000 étudiants. Depuis  un an, les actions des quatre entreprises spécialisées dans le secteur de l'éducation qui sont inscrites à la Bourse de Sao Paulo ont grimpé de 25% en moyenne.

Le secteur de l'éducation au Brésil est l'un des moins performants au monde, affirme Eduardo Wurzmann, directeur du groupe IBMEC, une société d'enseignement brésilienne qui offre l'un des programmes de MBA les plus prestigieux au pays.

Mais il est l'un de ceux qui connaissent la croissance la plus forte.

Près de 90% des Brésiliens de 15 ans n'ont que de faibles connaissances en mathématiques, observe dans une étude récente la Banque interaméricaine de développement. Et ils se classent selon l'OCDE au 46e rang mondial, derrière l'Indonésie, quant à leurs capacités en lecture.

« Le Brésil paie encore pour les coupes infligées au système éducatif pendant 20 ans par le gouvernement militaire (de 1964 à 1985) », estime Nelson Maculan, ex-ministre de l'Éducation de l'État de Rio de Janeiro.

Ralenti par une bureaucratie tatillonne,  le secteur public n'arrive pas suffire à la demande générée par la croissance démographique - plus du tiers des Brésiliens sont en âge de fréquenter l'école - et une création d'emplois record.

Devant les difficultés du secteur public, c'est l'éducation privée qui prend le relais. Au Brésil, trois étudiants sur quatre fréquentent une école privée. Et les familles de la classe moyenne, de plus en plus nombreuses, peuvent désormais se tourner vers les institutions bancaires pour financer les dépenses scolaires, un fait impensable voici 10 ans.

En janvier, Itau fut la première banque du Brésil à offrir un programme de prêts étudiants. Selon la banque, 800 000 personnes pourraient accéder aux études supérieures chaque année grâce à ce type de prêt.

« Il manque présentement 100 000 professionnels dans le secteur des technologies de l'information », illustre Eduardo Wurzmann, dont le groupe a reçu une injection de 80 millions CAN du fonds d'investissement Capital Group en février contre une participation minoritaire.

« Améliorer le secteur de l'éducation demande du temps. Mais si rien n'est fait d'ici 20 ans, il y aura un black-out au Brésil, prédit-il. Heureusement, les politiciens en sont aujourd'hui conscients. »