Quand le milliardaire américain Bill Gates viendra la semaine prochaine à Pékin expliquer son engagement de donner la moitié de sa fortune aux pauvres, il prêchera un très riche converti: Chen Guangbiao, le «philanthrope numéro 1 en Chine».

Ce très riche homme d'affaires a amassé plus de 560 millions d'euros de fonds personnels grâce à sa société spécialisée dans la démolition et le recyclage.

À sa mort, M. Chen compte léguer ce pactole à des oeuvres caritatives. Il assure avoir persuadé une centaine de richissimes Chinois de suivre sa voie et pense que la Chine peut devenir une Nation très généreuse, compte tenu de sa réussite économique.

«Si vous avez un verre d'eau, cela permet à une personne de boire. Si vous avez un seau d'eau, cela permet de donner à boire à votre famille. Mais si vous possédez une rivière, alors il vous faut la partager avec tout le monde», a-t-il expliqué à l'AFP dans une interview.

Le chef d'entreprise représente un modèle de «self-made man» parti de rien pour gravir ensuite tous les nouveaux échelons possibles dans l'économie socialiste très libéralisée.

Né il y a 42 ans dans la province rurale du Jiangsu (est), il raconte avoir connu les privations, dans les années de désastre qui ont suivi la Révolution culturelle. Parmi ses frères et soeurs, deux sont morts de famine et lui s'est souvent couché l'estomac vide.

De ses humbles origines, il conserve une certaine simplicité, notamment dans sa façon de se vêtir, d'un pantalon sport, d'une chemisette sans cravate et de chaussures bon marché. Sa générosité, il dit la tenir de ses parents qui offraient le peu qu'ils possédaient.

Son altruisme va de pair avec une sensibilité aiguë pour l'environnement. En 2008, il a même changé le nom de ses deux petits garçons, pour «Huanjing» (environnement) et «Huanbao» (protéger l'environnement).

Pour M. Chen, il n'y a pas de petites économies: il relate fièrement se passer de mouchoir, en pressant un index sur une narine après l'autre pour expulser les mucosités. Comme de nombreux Chinois.

Chen Guangbiao est devenu le chouchou des médias dans le débat récurrent qui agite la société chinoise, préoccupée des fossés qui se creusent et convaincue que les ultra-riches ne font pas assez pour les classes défavorisées.

Il assure avoir déjà distribué plus de 150 millions d'euros par charité et clame vouloir comme «Jésus Christ, (se) sacrifier pour rendre les gens heureux». Sur ses cartes de visite, figure la mention: «Philanthrope numéro 1 en Chine».

Pas étonnant dans ce cas qu'il ait ressenti une grande déception en lisant dans la presse que les milliardaires chinois traînaient les pieds pour rencontrer leurs homologues américains Bill Gates et Warren Buffett, lors d'un dîner prévu le 29 septembre à Pékin.

«Quand j'ai entendu cela, j'ai été indigné. Les gens riches de cette sorte sont vraiment trop égoïstes», a-t-il confié.

MM. Gates et Buffett, respectivement deuxième et troisième fortunes mondiales, veulent à l'occasion de cette soirée expliquer ce qui les a conduits à promettre la moitié de leur fortune à des oeuvres caritatives.

Selon le magazine Forbes, la Chine comptait l'an dernier 64 milliardaires en dollars, contre 403 pour les États-unis.

Les chiffres officiels en Chine montrent une hausse des dons aux oeuvres caritatives, parallèle à la forte croissance économique de ces dernières années.

En 2009, ils ont atteint 3,8 milliards d'euros. Mais l'année des records reste 2008, avec 12,3 milliards d'euros. La générosité avait été dopée par un terrible tremblement de terre en mai dans la province du Sichuan, qui avait fait près de 87 000 morts.