Pour discuter de la place des femmes dans le monde des affaires, HEC Montréal a offert au printemps dernier un séminaire destiné aux étudiantes du programme MBA. Cinq femmes d'affaires qui ont su se frayer un chemin au sommet de leur domaine - gestion de moyenne et grande entreprise, droit, entrepreneuriat et journalisme - ont ainsi échangé sur les défis auxquels elles ont été confrontées, sur les stratégies qu'elles ont mises en oeuvre pour les surmonter et sur les joies qu'elles vivent dans leur parcours professionnel. Trois grands thèmes se dégagent de leurs propos: travail, choix et entraide.

Le travail: incontournable!

Quel que soit le domaine dans lequel on travaille, et peu importe qu'on soit un homme ou une femme, le succès en affaires exige un travail assidu. En début de carrière, le manque d'expérience constitue le principal obstacle. Pour démontrer sa compétence, il est nécessaire de bien préparer ses dossiers et de les défendre avec conviction. Une formation comme le MBA donne une crédibilité supplémentaire dans cette démarche.

La passion qui anime les participantes est également un atout, comme le note Chloé Gregoire-Bessette, diplômée récente du MBA de HEC Montréal qui a assisté au séminaire. «Ce que je retiens, c'est leur passion pour le travail. Pour réussir, il faut mettre le coeur à l'ouvrage. Mais je crois que c'est plus facile quand on adore ce qu'on fait. Maintenant je sais que je veux vraiment aimer ce que je fais.»

Faire des choix

Les participantes s'entendent pour souligner la nécessité de maintenir un certain équilibre entre carrière et vie privée. Pour y arriver, il est nécessaire d'établir clairement des priorités et d'accepter les compromis. C'est ce que retient Valérie Thériault, également diplômée du MBA 2010. «Nous ne pouvons pas être des superwomen et faire tout parfaitement. Il faut apprendre à déléguer et à faire des choix.»

Le thème de la conciliation travail-famille demeure une préoccupation importante. Pour les participantes, cette conciliation requiert notamment de redéfinir les normes et les attentes: une PDG mère de quatre enfants raconte ainsi qu'elle a dû faire le deuil du parfum de muffins aux carottes sortant du four. Les muffins, elle les achète à la boulangerie! Pour d'autres, cette négociation passe par un questionnement quant à la décision de fonder une famille et à quel moment ou par la révision des ambitions professionnelles.

Entraide et solidarité

Pour assurer leur ascension vers des emplois de choix, les femmes doivent pouvoir compter sur une entraide mutuelle. Selon un sondage mené par le Forum économique mondial (Corporate Gender Gap Report 2010), les Canadiens croient que les barrières principales à l'accès des femmes dans les postes de leadership dans les organisations sont le manque de réseaux et de mentorat, de même que l'absence de modèles.

Les cinq participantes offrent un exemple probant de l'apparition d'un plus grand nombre de modèles pour les femmes aspirant à une carrière en affaires. Jouant elles-mêmes un rôle de mentor auprès de jeunes collègues, elles insistent sur l'importance du réseautage et de la création de relations d'affaires. On ne sait d'ailleurs pas quand une rencontre fortuite se transformera en occasion d'affaires et on gagne à mettre de l'avant une image professionnelle et soignée en tout temps. Comme le souligne la présidente d'une grande entreprise, «chaque personne que vous rencontrez est une entrevue».

La rentrée scolaire donne donc l'occasion de constater la forte présence des femmes dans les programmes d'études supérieures: plus de 60% des diplômes universitaires au Canada leur sont décernés. La participation des femmes dans les programmes de MBA au pays est également en croissance et elles représentent aujourd'hui plus du tiers des inscriptions (Catalyst Research, 2010).

Cette progression des femmes dans les programmes universitaires d'études en administration des affaires tarde néanmoins à se transposer pleinement dans le monde des affaires et peu d'entre elles évoluent dans les hautes sphères de la gestion. En effet, bien que les femmes détiennent 40% des postes de gestion, elles n'occupent que 14% des sièges sur les conseils d'administration et moins de 5% d'entre elles atteignent des postes de haute direction (Catalyst Research, 2010).

S'il reste un grand chemin à parcourir pour parvenir à une représentation équitable des femmes dans les postes de haute direction, le témoignage de celles qui ont atteint ces sommets et l'enthousiasme d'une nouvelle génération qui se lance sur le marché du travail incitent à l'optimisme. Pour les entreprises en quête d'une plus grande compétitivité, c'est toute la richesse d'une plus grande diversité de la main-d'oeuvre qui est à cultiver.

Johanne Brunet est professeure agrégée, Josyane Fortin est diplômée M.Sc et Yannik St-James est professeure adjointe à HEC Montréal.