La Banque du Canada a procédé mercredi à une troisième hausse consécutive de son taux directeur pour le porter à 1%, malgré le ralentissement de l'économie, mais devrait observer une pause pendant les prochains mois, estiment les économistes.

Cette hausse, d'un quart de point, était la troisième depuis juin, alors que la Banque du Canada était devenue la première d'un pays du G7 en près de deux ans à donner un tour de vis à sa politique monétaire.

Elle était attendue par une majorité d'analystes, même si certains pensaient que la banque laisserait son taux inchangé en raison des craintes d'une rechute de l'économie américaine, qui représente le quart du produit intérieur brut canadien.

La plupart des économistes, à l'instar de Pascal Gauthier, de la Banque TD, ou Douglas Porter, de la BMO, n'ont pas hésité à qualifier d'«optimiste» le tableau de la situation économique dressé par la banque centrale.

Celle-ci reconnaît que «la reprise économique au Canada sera légèrement plus graduelle» qu'elle ne l'avait projeté en juillet, alors qu'elle tablait sur une croissance de 3,5% en 2010, en raison surtout de «l'affaiblissement des perspectives» aux Etats-Unis.

Elle souligne aussi qu'aux États-Unis, «le redressement de la demande privée est ralenti par le chômage élevé, et les indicateurs récents laissent entrevoir une reprise plus modeste à court terme».

Mais, contrairement à son annonce de juillet, la banque n'a pas fait allusion à la crise de l'endettement dans la zone euro.

Elle reconnaît certes qu'une «incertitude inhabituelle» pèse sur ses perspectives, mais elle insiste sur le fait que, malgré le resserrement de sa politique monétaire, les conditions financières au Canada demeurent «exceptionnellement expansionnistes».

Elle juge également que l'inflation «a en gros évolué» conformément à ses attentes, même si celle-ci a été récemment «beaucoup plus faible que prévu», note Pascal Gauthier.

Après une forte croissance fin 2009 et au début de cette année, l'économie canadienne a freiné brusquement au deuxième trimestre à 2% en rythme annuel, en raison surtout d'un commerce extérieur négatif.

Mais la demande intérieure finale canadienne est demeurée vigoureuse, enregistrant une hausse plus forte que prévu pour un quatrième trimestre consécutif.

Au Canada, la banque est notamment encouragée par la consommation, qui «progresse toujours vigoureusement» et par la forte augmentation de l'investissement des entreprises.

M. Gauthier est «un peu plus pessimiste» que la banque concernant la consommation, «compte tenu de l'endettement des ménages et de ces hausses de taux d'intérêt».

Il croit également que la prévision de croissance de 2,9% de la banque pour l'économie canadienne en 2011 est «un petit peu trop optimiste».

Dans l'ensemble, les économistes insistent sur le prolongement des difficultés économiques aux États-Unis et leurs conséquences pour l'économie canadienne, tout en écartant une nouvelle récession du côté américain.

La banque centrale canadienne n'exclut pas pour autant une «nouvelle réduction du degré de détente monétaire», mais elle note que celle-ci «devra être évaluée avec soin, à la lumière de l'incertitude inhabituelle pesant sur les perspectives».

Dans ce contexte, la majorité des analystes s'attendent à ce que la banque laisse son taux inchangé lors de ses trois prochaines réunions d'octobre, décembre et janvier prochains.

Benoit Durocher, du Mouvement Desjardins, estime que la poursuite du resserrement monétaire pourrait ne reprendre qu'au «printemps prochain, lorsque les perspectives économiques nord-américaines seront plus solides».