Research In Motion Inc., le fabricant canadien du téléphone intelligent BlackBerry, fait face à de plus en plus de difficultés quant à son essor à l'étranger au moment où des pays en développement adoptent des restrictions plus rigoureuses concernant les courriels transmis par téléphonie mobile.

Ainsi, les Émirats arabes unis, où se trouve Dubaï, le noyau des affaires au Proche-Orient, ont fait savoir dimanche qu'ils pourraient suspendre les services de courriel du BlackBerry en octobre de crainte que l'appareil ne serve à la commission de crimes. Cette annonce survient quelques jours après qu'un responsable en Inde eut indiqué que le pays pourrait interdire la transmission des courriels par BlackBerry et après que des reportages eurent souligné que l'Arabie Saoudite pourrait imposer une telle suspension dès ce mois-ci.

«C'est un reflet des craintes touchant l'espionnage et la cybersécurité qui s'étendent maintenant aux téléphones cellulaires», explique Ron Deibert, directeur du Citizen Lab, de l'Université de Toronto, qui a aidé des collègues à démasquer un complot contre le gouvernement indien impliquant des ordinateurs en Chine.

«C'est le genre de choses qui deviendra plus fréquent pour RIM tandis que l'entreprise se débat avec des questions éthiques et la politique publique sur les marchés émergents», ajoute-t-il.

RIM, de Waterloo, en Ontario, axe ses efforts sur des pays tels que l'Inde, les Émirats arabes unis, l'Indonésie et le Brésil au moment où son essor entrepris il y a une décennie en Amérique du Nord ralentit. Les revenus tirés de pays hors de l'Amérique du Nord ont bondi à 37% des ventes de 15 milliards US réalisées par RIM au cours du dernier exercice financier, en hausse par rapport aux 23% dégagés lors de l'exercice terminé en février 2005.

Pour RIM, pionnier de la fabrication des dispositifs portables de transmission de courriels, la sécurité est l'un des principaux avantages que l'entreprise revendique par rapport aux produits des concurrents. Les courriels transmis par ses clients sont cryptés et expédiés par la voie des propres serveurs de RIM et de centres d'opération de réseaux, dont le gros de l'équipement se trouve au Canada. Cette sécurité a rendu les BlackBerry populaires auprès des entreprises et des dirigeants politiques, y compris Barack Obama, qui a conservé son BlackBerry après avoir été élu à la Maison-Blanche.

Toutefois, ce système complique aussi la tâche des gouvernements pour surveiller les communications transmises par BlackBerry comparativement aux messages expédiés par d'autres téléphones intelligents, qui voyagent par internet. À cet égard, les appareils de RIM font craindre à certains pays qu'ils soient utilisés pour transmettre des courriels ou des messages pour coordonner une attaque terroriste ou faire tomber un gouvernement.

Discussions

En Arabie Saoudite, les trois firmes de télécommunications du pays discutent avec RIM d'une adaptation des services du téléphone multimédia BlackBerry à la réglementation saoudienne, a indiqué hier à l'AFP le responsable de l'une de ces firmes.

«Nous sommes optimistes quant à la possibilité de parvenir à une solution dans les jours qui viennent», a déclaré ce responsable sous le couvert de l'anonymat, précisant qu'une réunion a eu lieu hier entre les firmes STC, Mobily et Zain, avec le représentant de RIM pour le Moyen-Orient.

«Notre principale demande consiste à demander à RIM de faire passer les données par un serveur local ou de trouver une alternative» qui permette de contrôler les contenus échangés, a ajouté ce responsable.

RIM a annoncé hier qu'il était «en discussions» avec des pays sans les citer et qu'il s'engageait à garantir des communications sécurisées.

Dans un communiqué, RIM indique qu'il «ne révèle pas le contenu des discussions confidentielles ayant lieu avec les autorités de régulations d'aucun gouvernement, mais il assure à ses clients qu'il est décidé à continuer à fournir des produits hautement sécurisés et novateurs qui satisfont aussi bien les besoins des clients que ceux des gouvernements»