L'économie canadienne pourrait résister à une rechute des États-Unis en récession, comme elle l'a fait lors de la contraction américaine, en 2001.

Elle chuterait à son tour, cependant, si nos voisins devaient revivre un choc financier et économique aussi violent que celui de l'automne 2008, car la confiance céderait le pas à l'inquiétude. C'est toutefois un scénario moins probable qu'une rechute légère.

L'explication est toute simple, selon Jimmy Jean, économiste de Moody's Economy.com: «L'économie canadienne dépend moins de ses exportations. Leur part représentait près de 40% du PIB (produit intérieur brut) en 2000, comparativement à seulement 27% en 2009.»

Il en résulte une diminution proportionnelle de l'emploi manufacturier qui ne représente plus que 10% de l'ensemble des salariés, comparativement à 15%, 10 ans plus tôt.

En outre, fait ressortir M. Jean, la part de l'extraction minière et énergétique dans le produit intérieur brut s'élève à peine à 4%, la même que celle des technologies de l'information. «L'image d'un Canada fournisseur de ressources doit être mise à jour.»

Les nouvelles technologies et les services s'y rattachant occupent une part de plus en plus grande dans l'emploi et la production de richesse.

Voilà sans doute pourquoi la demande intérieure est restée solide durant la dernière récession, marquée par un effondrement de plus de 25% des exportations.

La recrudescence du chômage y a été aussi plus faible que durant les récessions de 1981 et de 1990-1991.

Le taux de chômage a atteint un sommet de 8,7% en 2009. C'est beaucoup moins que les 12,1% et 13,1% des deux récessions précédentes.

Il ne manque plus que 14 000 emplois pour recouvrer l'ensemble des 417 000 perdus en 2008-2009. Si cela devait se réaliser en juillet, ce qui est fort possible, alors il n'aura fallu que 20 mois pour renouer avec le sommet d'emplois du précédent cycle. Il en avait fallu près de 40 durant les années 80 et plus de 50 durant les années 90, marquées par une recrudescence des exportations à la faveur de l'entrée en vigueur de l'Accord de libre-échange avec les États-Unis, le 1er janvier 1989.

«Mieux, les perspectives d'embauche restent bonnes puisque beaucoup d'entreprises entendent accroître leur effectif d'ici la fin de l'année, selon l'Enquête sur les perspectives des entreprises», note Sal Guatieri, économiste principal à BMO Marchés des capitaux.

Cette reprise de l'emploi se réalise même si les fabricants font encore davantage de licenciements que d'embauches.

L'embauche est assurée par le secteur des services qui a dépassé depuis plusieurs mois son sommet d'avant récession et par la construction qui profite des conditions de crédit avantageuses. Elles n'existent pas au sud de la frontière, malgré la politique monétaire de la Réserve fédérale des plus accommodantes. Les institutions financières américaines préfèrent empiler leurs liquidités plutôt que de prêter aux entreprises et aux individus, compte tenu de la plus grande fragilité de leur bilan et de leur capitalisation.

Chômage aux États-Unis

Le marché du travail américain en souffre. Les petites entreprises, grandes responsables de la création d'emplois, hésitent à embaucher du personnel.

Le nombre de salariés du secteur privé a récupéré seulement un sixième de sa saignée de 7,5% jusqu'ici. Au Canada, non seulement la coupe a été moins radicale (4,3%), mais elle est déjà compensée aux trois quarts, fait observer M. Guatieri. (Les autres emplois créés viennent du secteur privé et de la cohorte des travailleurs autonomes.)

En prenant la méthodologie américaine, le taux de chômage s'élève à 6,8% au Canada, comparativement à 9,5% aux États-Unis.

«Le chômage élevé complique les budgets des États, provoquant des hausses de taxes et des réductions de services, note-t-il. Le chômage prolongé émousse de son côté les compétences et les habiletés des travailleurs.»

Les récents gains de productivité observés restent donc fragiles.