Elles se nomment Mary Schapiro, Sheila Bair et Elizabeth Warren. Ces trois Américaines à la tête d'instances de régulation et d'une commission parlementaire incarnent la volonté des autorités américaines d'assainir Wall Street.

«Contrairement à beaucoup d'hommes qu'elles supervisent, les nouveaux shérifs de Wall Street n'ont jamais aspiré à un salaire à huit chiffres ou à un bureau luxueux», notait il y a quelques semaines l'hebdomadaire Time en leur offrant sa couverture. «Bair, Schapiro et Warren ont toutes mené leurs carrières loin de Manhattan, prenant des responsabilités alors même qu'elles étaient enceintes et en faisant mieux que les hommes autour d'elles», ajoutait-il.

Toutes trois sont toutefois diversement appréciées.

Mary Schapiro, directrice de la SEC, l'autorité des marchés américains, a été nommée par le président américain Barack Obama en janvier 2009 avec pour mission de restaurer la réputation de l'institution, accusée de n'avoir vu venir ni la crise ni le scandale Madoff.

Sous la gouverne de Mme Schapiro, la SEC a demandé plus de transparence dans l'attribution des stock-options et appelé à la modération dans la rémunération des traders.

Elle a surtout fait trembler le milieu de la finance en s'attaquant à la star des banques d'affaires, Goldman Sachs, qu'elle accuse d'avoir trompé des investisseurs en leur vendant des produits financiers risqués adossés à des crédit immobiliers à risque (CDO).

Elle a aussi décidé cette semaine d'instaurer des coupe-circuit sur les plateformes de marché pour empêcher un nouveau «krach-éclair» comme celui du 6 mai à la Bourse de New York.

Mme Schapiro est toutefois loin de faire l'unanimité. Gregori Volokhine, analyste du cabinet de gestion Meeschaert New York, remarque qu'elle dirigeait la Finra, autorité de régulation sectorielle (non gouvernementale) des marchés avant d'être nommée à la SEC, et qu'elle n'y a pas été très «énergique».

«Attaquer Goldman Sachs, ce n'est pas réformer le système», poursuit-il.

Sheila Bair dirige le régulateur bancaire américain, la FDIC, depuis 2006, à la suite d'une carrière dans la régulation financière et l'enseignement supérieur.

Elle est respectée pour avoir été l'une des rares à avoir anticipé le problème des CDO, à l'origine de la contamination de la crise dans l'ensemble du système financier mondial.

Pour Peter Morici, professeur d'économie à l'Université du Maryland, «le pays serait en meilleur état si Obama l'avait nommée secrétaire au Trésor à la place de Tim Geithner».

Plus circonspect, Gregori Volokhine juge que Sheila Bair est un peu «en perte de vitesse» car elle a essayé sans succès d'obtenir plus de prérogatives pour la FDIC dans le cadre de la réforme financière en préparation au Congrès.

Elizabeth Warren, avocate et professeur de droit à Harvard, a été nommée en novembre 2008 présidente de la commission parlementaire chargée de superviser les plans de soutien gouvernementaux mis en place après la crise.

Si Peter Morici se montre dubitatif face au projet d'agence de protection des consommateurs cher à Mme Warren, Gregori Volokhine salue une «activiste indépendante d'esprit» qui «essaie de faire avancer les choses».

A ces femmes officiellement chargées de gendarmer la finance s'ajoute Blanche Lincoln, sénatrice à l'origine des mesures les plus radicales du projet de réforme financière.

L'élue démocrate de l'Arkansas défend une séparation des activités de produits dérivés des banques, afin que ces marchés opaques, lucratifs et risqués ne bénéficient pas de la garantie de la Réserve fédérale.

Une mesure redoutée par Wall Street, mais qui pourrait ne pas figurer dans le texte final.