Celui qui a dit non à l'entrée du Royaume-Uni dans la zone euro, l'ancien premier ministre John Major, croit que la Grèce sera en défaut de paiement sur sa dette dans la prochaine année. Malgré cela, Athènes devrait pouvoir conserver la monnaie unique.

De passage à la Conférence de Montréal, hier, celui qui a succédé à Margaret Thatcher y est allé de pronostics pessimistes concernant le pays de l'Acropole. «Est-ce que la Grèce sera en défaut de paiement sur sa dette? Je pense que c'est fort probable qu'elle le sera, à moins qu'on ne lui offre d'autres ressources, que ce soit du FMI ou de l'Union européenne», a-t-il dit à la clôture du rendez-vous.

Début mai, l'Union européenne et le FMI ont consenti 110 milliards d'euros d'aide à la Grèce. Cette aide, qui s'accompagne d'un plan d'austérité budgétaire, sera clairement insuffisante, selon l'ancien premier ministre.

«Je pense que les fonds qui lui sont accordés vont lui permettre de souffler pendant un an. Mais je suis un peu pessimiste sur le fait qu'elle pourrait devoir restructurer sa dette ou être en défaut de paiement.»

M. Major estime que le plan le plus probable est «un défaut de paiement partiel», soit une restructuration de la dette grecque. Celle-ci atteint 115% du PIB grec, soit plus que la taille de son économie.

Survie de la zone euro

Est-ce à dire que ce sera la fin de la zone euro, comme plusieurs l'évoquent depuis que le boulet financier de la Grèce (et de l'Italie, de l'Espagne et du Portugal) fait les manchettes? Non, car les pays européens, qui ont connu deux guerres mondiales, précédées de près d'un millénaire de guerres multiples, tiennent à cette union qui les rend plus pacifiques, a-t-il expliqué.

Une autre option entendue maintes fois, c'est la sortie de la Grèce de la zone euro, comme un rejeton indiscipliné qu'un parent déciderait de mettre à la porte. «C'est envisageable, mais je ne sais pas trop comment cela peut se faire.»

«Il ne faut pas sous-estimer la volonté de l'Union européenne de conserver la Grèce à l'intérieur de la zone euro», ajoute-t-il.

M. Major évoque quand même un scénario selon lequel la Grèce quitterait la zone euro pour une journée. Elle en profiterait pour dévaluer ses avoirs et sa dette, et reviendrait dans la zone euro le lendemain. «À l'heure actuelle, reconnaît-il lui-même, il n'y a pas assez d'éléments pour savoir quel scénario se réalisera.»

En 1991, John Major a rejeté les dispositions du Traité de Maastricht touchant la création de la monnaie unique européenne. Il croyait, dit-il aujourd'hui, que les économies des pays du Sud de l'Europe n'étaient pas prêtes à aller de l'avant avec l'euro.

L'Europe a quand même lancé l'euro quelques années plus tard. «Selon moi, elle est allée de l'avant au mauvais moment, au mauvais taux de change, pour les mauvaises raisons et dans les mauvaises circonstances. Mais le reste de ses décisions étaient probablement correctes.»

Sur cette note d'humour bien anglais, la Conférence de Montréal s'est donné rendez-vous du 6 au 9 juin l'an prochain, avec un thème qui ressemblera à ceci: L'ordre économique mondial en mutation.