Les dépenses de consommation des ménages américains progressent actuellement plus vite que leurs revenus, mais cette tendance, qui a soutenu la croissance au premier trimestre, pourrait bientôt avoir fait long feu.

Selon les chiffres publiés lundi par le département du Commerce, la consommation a augmenté en mars pour le sixième mois d'affilée, de 0,6% par rapport à février, ce qui était conforme à la prévision médiane des analystes.

Le suspense entourant ce chiffre était assez faible dans la mesure où il pouvait être approché à partir de l'estimation officielle du PIB publiée vendredi.

Celle-ci montre que la consommation des ménages a retrouvé son rôle de moteur de l'activité américaine en assurant les quatre cinquièmes de la croissance économique de 3,2% mesurée aux États-Unis au premier trimestre.

Les choses pourraient cependant changer assez rapidement.

En données réelles, c'est-à-dire corrigées des effets de l'inflation, les dépenses de consommation des Américains ont progressé plus vite que le revenu disponible (après impôts et contribution sociales) sur les trois premiers mois de l'année.

Ces temps-ci, des hausses «plutôt faibles» du revenu disponible ont eu tendance à «s'accompagner de progressions fortes des dépenses de consommation», relève Inna Mufteeva, analyste de la banque française Natixis.

La consommation devrait «continuer de s'améliorer pendant quelque temps puisque cet effet de "désépargne" pourrait durer encore un peu», mais à long terme, «les dépenses des ménages devraient faiblir dès que les effets de la relance budgétaire se seront totalement évanouis», ajoute-t-elle.

Du fait de la hausse de leurs dépenses, le taux d'épargne des Américains (rapporté à leur revenu disponible) a baissé pour le troisième mois de suite, pour s'établir à 2,7%.

Ce taux, qui avait fortement augmenté avec la crise, jusqu'à atteindre 6,4% en mai 2009, est désormais à son plus bas niveau depuis septembre 2008, mois où la crise financière avait atteint son paroxysme.

Les chiffres du ministère montrent que les mesures du gouvernement contribuent encore beaucoup à l'amélioration du revenu disponible des ménages: celui-ci a augmenté de 0,3% en données brutes en mars, mais la hausse des revenus du travail n'a été que de 0,2%.

«Les ménages continent de dépenser davantage mais leurs revenus ne suivent pas, et c'est un signe inquiétant», estime l'économiste indépendant Joel Naroff.

Pour augmenter de manière durable, «les dépenses des ménages ne peuvent être soutenues que par une meilleure progression des revenus», donc de l'emploi, ajoute M. Naroff.

L'économie américaine est revenue à la création nette d'emplois au mois de mars. Le département du Travail doit publier vendredi son rapport officiel sur l'emploi pour avril, qui permettra de se faire une idée plus précise de la conjoncture.

Plusieurs responsables de la banque centrale (Fed) ont indiqué récemment qu'ils ne se contentaient pas du retour des embauches observé en mars. Alors que le chômage reste élevé (à 9,7%), ils veulent avoir d'autres signes tangibles d'amélioration du marché du travail dans les mois à venir.

Face à la persistance d'entraves à la croissance, la Fed a redit le 28 avril qu'elle comptait maintenir aussi longtemps que possible son taux directeur quasi nul, en vigueur depuis la mi-décembre 2008, de manière à continuer de stimuler l'activité économique au maximum.