Tandis que l'Europe paraît aspirée dans des abysses budgétaires, la croissance économique nord-américaine garde fière allure et gonfle les coffres de l'État.

En février, le produit intérieur brut (PIB) réel a avancé de 0,3%, indiquait hier Statistique Canada. Même avec une improbable croissance zéro en mars, l'économie aura progressé à près de 5,0% en rythme annualisé au premier trimestre.

Fait marquant, la moitié de l'avancée de février est attribuable à la poussée de 1,2% du secteur manufacturier. L'augmentation modeste des ventes des fabricants au cours du mois laisse supposer qu'ils ont recommencé à reconstituer leurs stocks. C'est un gage de croissance future.

Durant la période de six mois terminée en février, le secteur manufacturier est celui qui a le plus rebondi. «Avec deux mois d'écoulés dans le trimestre la fabrication croît à un rythme inégalé depuis 1988», observe Matthieu Arseneau, économiste chez Banque Nationale Groupe financier.

Tous les autres segments de la production de biens (agriculture, construction, services publics et extraction minière) ont progressé au cours du mois malgré le repli de l'extraction gazière et pétrolière attribuable à deux incendies.

L'ensemble du secteur des services, qui n'est plus en reprise mais déjà en expansion depuis plusieurs mois, enregistre un gain modeste de 0,1%. Le recul du commerce de gros a été compensé par l'apport des Jeux de Vancouver. Ils ont dopé les segments des loisirs, de l'hébergement et des médias.

Après six mois de reprise, le PIB réel n'est plus qu'à 1,7% de son sommet de juillet 2008.

La rapide convalescence de l'économie se fait sentir aussi dans les finances publiques canadiennes. Hier, le ministère des Finances annonçait un faible déficit de 900 millions en février, soit beaucoup moins que les manques à gagner de plus de 3 milliards par mois, enregistrés au printemps et à l'été dernier.

En fait, si on exprime la croissance en dollars courants pour tenir compte des variations de prix énormes dans les produits de base, le PIB progresse non pas à 5% en rythme annualisé mais plutôt à 10%. Ce PIB, dit nominal par opposition au réel qui mesure les volumes de la production, est le meilleur indicateur de la taille de l'assiette fiscale. «Il semble probable que le déficit de 53,8 milliards présenté dans le budget de mars soit ramené à 46 ou 47 milliards» estime Derek Burleton, directeur de l'analyse économique chez Groupe financier Banque TD.

Aux États-Unis, les données préliminaires du Département du Commerce font état d'un gain annualisé du PIB réel de 3,2%, de janvier à mars, contre 5,6% pour le trimestre précédent. Cette décélération a été pourtant bien accueillie. «La demande intérieure finale (qui regroupe les dépenses et les investissements des ménages, des entreprises et des gouvernements) s'est accélérée, passant de 1,4% à la fin de 2009 à 2,2% au premier trimestre de 2002, ce qui est un pas de plus vers une relance durable de l'économie», juge Francis Généreux, économiste principal chez Desjardins.

Le PIB réel américain n'est plus qu'à 1,2% de son sommet d'avant récession, constate Stéfane Marion, économiste en chef de la banque Nationale. «Seule la construction (7% de l'économie) est en plein marasme avec un retard de 20% sur son niveau de 2008. Pour plus de 90% de l'économie, l'expansion a déjà débuté.»