Le Québec, c'est connu, a été frappé moins durement par la récession que les autres provinces canadiennes. Or, cette bonne performance relative a pour conséquence de priver le gouvernement d'importants transferts fédéraux.

Dans ses documents budgétaires, le gouvernement du Québec estime même qu'il perdra 664 millions de dollars de péréquation au cours du prochain exercice financier, en 2011-2012. C'est autant d'argent que le Québec devra récupérer d'une autre façon pour équilibrer son budget, par exemple avec la TVQ ou l'impôt santé. La péréquation est un programme fédéral qui permet aux provinces d'assurer des services publics comparables partout au pays, compte tenu de leur capacité de taxation. Les paiements de péréquation varient notamment en fonction de la croissance économique relative des provinces.

En 2009, la récession a fait reculer de 1,7% la production de l'ensemble des biens et services du Québec (le produit intérieur brut ou PIB), selon l'Institut de la statistique du Québec. Cette récession a fait souffrir le Québec, mais moins qu'ailleurs au Canada. La Colombie-Britannique a reculé de 2,5%, l'Alberta, de 3,7%, et l'Ontario, de 3,4%. La moyenne canadienne est de -2,5%. La déconfiture ontarienne, avec son secteur de l'auto, fait d'ailleurs en sorte que cette province touche des paiements de péréquation pour la première fois depuis des lustres.

Au Québec, les paiements de péréquation pour l'année financière 2010-2011, qui a commencé le 1er avril, totaliseront 8,6 milliards de dollars. La bonne tenue relative de notre économie se fera sentir l'an prochain, en 2011-2012, avec le recul prévu de 664 millions, à 7,9 milliards.

Le décalage entre la performance économique et les versements tient au fait que le programme de péréquation retarde de deux ans les paiements, basés par ailleurs sur la variation de l'économie des trois années précédentes.

Dans ses équilibres financiers, le ministère des Finances du Québec a tenu compte de ces pertes de revenus de 664 millions en 2011-2012. La hausse d'un point de pourcentage de la TVQ ou encore l'impôt santé servira donc en partie à compenser cette baisse de revenus dans l'atteinte du déficit zéro.

Par ailleurs, le gouvernement du Québec a plusieurs litiges avec le fédéral concernant la péréquation, apprend-on dans le budget. Le ministère des Finances réclame ainsi 845 millions de dollars par année au fédéral pour de présumés mauvais calculs de péréquation.

Le premier dossier concerne l'inclusion des revenus d'Hydro-Québec dans le calcul de la richesse du Québec. Le ministère estime que le fédéral inclut une trop grande part des revenus d'Hydro, ce qui accroît la richesse relative du Québec et diminue les versements de péréquation. En principe, les dividendes d'Hydro-Québec sont inclus au titre des revenus de ressources naturelles. Or, pour l'Ontario, le fédéral vient d'exclure de ces revenus ceux tirés par Hydro One, le pendant ontarien d'Hydro-Québec, dans le transport et la distribution d'électricité.

Québec réclame un traitement équivalent. Ainsi, retrancher le transport et la distribution d'électricité des revenus de l'assiette des ressources naturelles de la péréquation rapporterait 250 millions de dollars par année au Québec.

«Le Québec a transmis au gouvernement fédéral toutes les données nécessaires pour procéder au changement demandé. Malgré plusieurs demandes du Québec, le gouvernement fédéral s'est montré peu empressé à corriger cette situation», est-il écrit dans le budget.

Le deuxième litige porte sur l'iniquité du calcul des paiements depuis que le fédéral a plafonné l'enveloppe, en novembre 2008. Le ministère des Finances du Québec soutient qu'avec le nouveau régime, la capacité fiscale du Québec après péréquation est plus faible qu'ailleurs. L'écart global serait de 357 millions par année.

Enfin, le Québec réclame des «paiements de protection» du fédéral afin que les versements ne diminuent pas en 2011-2012, entre autres. Ces «paiements de protection» ont été versés à plusieurs reprises par le fédéral pour d'autres provinces ces dernières années.

Le Québec n'a pas bénéficié de ces paiements en 2003 lorsque les transferts fédéraux ont baissé. Il rembourse d'ailleurs toujours au fédéral des sommes reçues en trop, de l'ordre de 238 millions par année, fait valoir le ministère des Finances du Québec. Bref, le dossier est à suivre.