Les régimes de retraite à prestations déterminées (RPD) ne se sont pas encore remis de la crise financière de 2008 et aucun plan d'aide directe n'a été mis de l'avant pour les aider à la traverser.

Tel est le premier constat d'une recherche menée par quatre chercheurs de l'Institut de recherche en économie contemporaine (IREC). «Les caisses de retraite semblent avoir constitué l'angle mort des plans de sauvetage financier», y lit-on d'entrée de jeu.

L'impact de la crise financière sur les régimes complémentaires de retraite au Québec: constats et interrogation déplore que fort peu a été fait pour éviter la détérioration de la valeur des actifs des RPD. Pourtant, «certaines mesures auraient pu être envisagées: avances aux caisses de retraite qui ont besoin de liquidités, prises en pension d'actifs de la part de la Banque du Canada ou des gouvernements, création d'un groupe de caisses de retraite pour soutenir la valeur des actifs sur le marché, etc.»

Bien sûr, il y a eu quelques mesures pour pallier au plus urgent, comme l'adoption de la Loi 1 par l'Assemblée nationale qui assouplit les obligations pour les employeurs de renflouement des régimes insolvables. Rien toutefois, analysent les auteurs, pour augmenter la résistance du système de retraite aux chocs financiers. «Cette politique conduit à un transfert de risque de la gestion des régimes sur les cotisants actifs et les contribuables, qui devront se partager les coûts liés à la socialisation des pertes.» Un plus grand nombre devra épargner ou travailler davantage alors que d'autres dépendront du filet social une fois retraités.

Les résultats désastreux de la Caisse de dépôt et placement en 2008 (pertes de 39,8 milliards) et des perspectives peu reluisantes pour 2009 malgré le redressement des marchés financiers créent des défis à long terme pour le Régime des rentes du Québec. Il affrontera sous peu un choc démographique au moment où sa réserve accuse un manque à gagner.

Les auteurs le déplorent, mais ils s'efforcent avant tout de débusquer ce qui guette les RPD du secteur privé et la retraite de leurs participants. Ils notent que le degré de solvabilité des régimes surveillés par la Régie des rentes s'établissait à 70% seulement au 31 décembre 2008. Cela signifie qu'en cas de terminaison, les participants actifs et retraités auraient droit à 70% seulement des engagements financiers pris par le régime (et en bout de piste par l'employeur) envers eux.

La solvabilité s'est néanmoins améliorée en 2009, sans être complètement rétablie grâce aux bons rendements (la médiane serait entre 14% et 15% selon un calcul indiciel) et aux cotisations d'équilibre auxquelles sont soumis les employeurs promoteurs. La firme d'actuaires Aon estime que le degré de solvabilité des caisses canadiennes serait à 86% au 31 décembre dernier. Malgré cela, encore 84% des régimes accuseraient un déficit de solvabilité.

Manque d'information

L'étude déplore le manque d'informations disponibles sur les RPD au Québec, ce qui ne facilite pas la tâche des élus, dans la mesure où ils désireraient redresser la situation. Où investissent-ils? D'où sont-ils gérés? «Il est troublant de constater que l'Institut de la statistique du Québec ne détient aucun portrait global de la situation financière des régimes complémentaires de retraite au Québec», notent les quatre auteurs Frédéric Hanin et François L'Italien, rattachés à l'Université Laval, Mathieu St-Onge et Éric Pineault de l'UQAM.

Aussi se sont-ils attelés à la tâche d'en dresser un en disséquant les données disponibles, généralement à l'échelle canadienne car «le Québec n'existe pas comme catégorie d'analyse».

Ils arrivent quand même à compter que plus de 1,47 million de travailleurs adhéraient à un régime de retraite, répartis grosso modo entre les secteurs public et privé.

Dans le privé, le secteur manufacturier offre la plus grande couverture avec 424 régimes dotés d'un actif de 23,9 milliards, fin 2008, soit environ le quart de la valeur de l'actif global des régimes au Québec. L'administration publique et les services publics suivent tandis que la construction, l'éducation et la santé ferment la marche.

La taille d'une entreprise ne va pas de pair avec celle de son régime. Ainsi, si l'actif des régimes de Rio-Tinto Alcan s'élevait à plus de 26 milliards en décembre 2007 pour un effectif québécois de 7450 personnes, celui de CGI avec ses 9000 employés égale un gros zéro.

«Le développement de la «nouvelle économie» n'a pas conduit à une amélioration des régimes complémentaires», constatent les auteurs.