Le feuilleton juridique se poursuit dans le sans-fil: après Rogers, c'est maintenant au tour de Bell (T.BCE) de devoir retirer les publicités où elle présente son réseau sans fil comme «le plus fiable» au pays.

Un juge de la Cour suprême de Colombie-Britannique a statué hier que cette allégation était «sans fondement». En conséquence, le conglomérat montréalais devra revoir tout un pan de sa stratégie de marketing à moins de 10 jours de Noël.

Cette injonction fait suite à une poursuite déposée il y a deux semaines par Rogers, grand concurrent de Bell dans le sans-fil. L'entreprise ne digérait pas que Bell présente son nouveau réseau 3G+ comme «le plus vaste, le plus fiable et le plus rapide» du Canada.

Selon la poursuite, Bell ne pouvait faire de telles affirmations, puisque son réseau est en activité depuis à peine un mois et compte très peu de clients. La plupart des abonnés utilisent encore l'ancien réseau de type CDMA.

«J'applaudis le juge d'avoir compris comment le public canadien reconnaît la fiabilité: huit Canadiens sur dix croient que la fiabilité ne peut pas être mesurée sur un réseau sans clients, qui n'a pas été testé», a affirmé John Boynton, vice-président et directeur du marketing chez Rogers, en entrevue à La Presse Affaires.

Cette injonction obligera Bell à retirer environ 10% de ses publicités liées au sans-fil. Rogers avait elle aussi dû éliminer plusieurs annonces il y a deux semaines, à la suite d'une poursuite intentée - et gagnée - par Telus pour des raisons similaires. Un retrait qui a coûté plus de 3 millions de dollars à l'entreprise ontarienne.

Malgré tous les désagréments à venir, Bell a tenté de présenter les choses sous un jour positif. «Il n'y a pas eu de contestation du fait que nous avons le réseau le plus rapide, le plus vaste, le meilleur et le plus puissant, tous des éléments que Rogers avait aussi contestés», a fait valoir le porte-parole, Mark Langton.

Bell songe d'ailleurs à en appeler de la décision rendue hier à Vancouver, qui porte uniquement sur la notion de fiabilité.

Telus, de son côté, s'est réjouie de l'injonction émise contre Bell. «Ce que cette décision dit en fait, c'est qu'il faut être honnête dans les publicités, et que si on ne l'est pas, il y aura des conséquences», a dit le porte-parole, Shawn Hall.

Nouvelle concurrence

Ces déchirements juridiques entre les trois géants du sans-fil - qui contrôlent ensemble 95% du marché canadien - surviennent alors que cette industrie s'apprête à vivre de profonds changements. Plusieurs nouveaux concurrents commenceront leurs activités au cours des prochains mois en vue de s'approprier une partie de ce marché de 16 milliards de dollars.

Premier en lice, Globalive a lancé hier son service à Toronto. Cette société financée en majeure partie par des capitaux égyptiens offrira le sans-fil à prix modéré dans toutes les provinces, à l'exception du Québec.

Les fournisseurs établis sont en mode défensif, et le lancement d'un nouveau réseau 3G+ le mois dernier constitue une étape majeure en vue d'affronter la nouvelle concurrence.

Ce réseau, construit en partenariat par Bell et Telus, permet d'offrir plusieurs nouveaux téléphones «intelligents» comme le iPhone d'Apple, auparavant une exclusivité de Rogers.

Le titre de Bell Canada Entreprises n'a pas été ébranlé par la décision rendue hier. Il a clôturé à 26,38$ à la Bourse de Toronto, en baisse de 2 cents.