Le taux de chômage aux États-Unis a franchi en octobre la barre symbolique des 10% pour atteindre 10,2%, un niveau jamais vu depuis 1983, signe que la bataille pour l'emploi du président Barack Obama est loin d'être gagnée.

Selon le rapport mensuel sur l'emploi du département du Travail publié vendredi, l'économie américaine a détruit 190 000 postes en octobre, soit 13,3% de moins que le mois précédent, qui avait marqué un coup dur pour l'emploi, mais encore bien plus qu'en août, quand les licenciements nets étaient tombés à 154 000.

La baisse des licenciements est moins forte que ne le prévoyaient les analystes, qui tablaient sur 175 000 suppressions de postes.

Malgré la révision en forte baisse du nombre d'emplois perdus en septembre, le taux de chômage a bondi de 0,4 point pour atteindre 10,2%, du jamais vu depuis avril 1983.

Mais la réalité est bien pire si l'on tient compte des chômeurs dits «découragés» et des personnes que la crise contraint à travailler à temps partiel alors qu'elles voudraient un emploi à plein temps. Peter Morici, professeur d'économie à l'université du Maryland, estimait jeudi que dans ce cas, le chômage réel atteignait en fait 18%.

La prévision de la banque centrale américaine (Fed) d'un chômage maximum de 10,1% en 2009 est d'ores et déjà caduque.

Bien que les États-Unis soient sortis de la récession en août, la hausse du chômage est naturelle dans la mesure où le marché de l'emploi réagit toujours  avec retard à la reprise de l'activité.

Mais l'ampleur de sa hausse inquiète économistes et autorités. Ceux-ci craignent qu'elle fasse dérailler la croissance naissante en réduisant fortement la propension des ménages à consommer, alors que leur dépenses sont en temps normal le principal moteur de l'économie du pays.

Redoutant la formation d'un cercle vicieux, les dirigeants de la Fed ont laissé publiquement percer en octobre leur crainte que la croissance ne soit pas assez forte en 2010 pour faire baisser «sensiblement» le chômage.

En conséquence, ils ont indiqué mercredi que la banque centrale était encore bien loin de retirer son soutien énorme à l'économie.

Au sortir d'une récession, «les entreprises augmentent traditionnellement leur production en augmentant d'abord le nombre d'heures travaillées et le recours au travail temporaire. Mais rien de cela n'est encore arrivé», notait Mark Zandi, chef du cabinet Moody's Economy.com, dans une tribune publiée en début de semaine dans le New York Times.

Le rapport sur l'emploi d'octobre montre effectivement que les heures travaillées sont restées stables à un niveau historiquement très faible et que si 34 000 emplois temporaires ont tout de même été créés ce mois-là, ils restent en baisse de 44 000 par mois en moyenne depuis le début de l'année.

M. Zandi plaidait dans sa tribune pour que le gouvernement vienne en aide très rapidement aux petites et moyennes entreprises, les seules à mêmes de créer les emplois capables de remettre l'économie sur les rails.

Selon la presse américaine, le gouvernement réfléchit actuellement à des mesures d'incitations à l'emploi pour ces entreprises étranglées par la crise du crédit.

Le prix Nobel d'économie Paul Krugman plaidait pour sa part vendredi dans le New York Times pour des mesures de relance supplémentaires. Pour lui, la politique économique de M. Obama risque de connaître le même sort que les Alliés en Italie en 1943: l'enlisement, faute de renforts.