Faute d'avoir la taille suffisante pour jouer dans la cour des grands, le groupe belge Solvay a décidé lundi de vendre ses activités pharmaceutiques à l'américain Abbott (ABT) pour 7,6 milliards de dollars US et de se recentrer sur la chimie et les plastiques.

«Nous construisons un nouveau groupe recentré, avec les moyens financiers d'accélérer encore notre croissance durable», a commenté le patron du groupe, Christian Jourquin.

Dans le détail, Abbott va verser à Solvay 6,6 milliards en espèces. S'y ajoutent jusqu'à 440 millions de versements à venir liés aux résultats, et 586 millions de reprise de dette.

C'est un peu un retour aux sources pour Solvay, qui à sa naissance au XIXe siècle était une entreprise chimique.

Le groupe reste aujourd'hui premier producteur mondial de carbonate de soude et la production industrielle de ce produit, utilisé dans l'industrie du verre, chimique et des détergents, utilise toujours le procédé à base de sel blanc et de calcaire mis au point à l'époque par Ernest Solvay.

Au fil des années, Solvay s'est toutefois diversifié dans d'autres secteurs, comme les plastiques et la pharmacie.

Mais en avril, le groupe basé à Bruxelles avait annoncé un réexamen stratégique de ses activités, disant examiner «toutes les options» pour sa pharmacie.

Outre Abbott, le français Sanofi-Aventis et le suisse Nycomed avait été cités dans la presse comme repreneurs potentiels.

La décision de vendre la pharmacie peut surprendre au premier abord, car c'est la division la plus rentable du groupe et celle qui jusqu'ici a résisté le mieux à la crise.

À la Bourse de Bruxelles, l'action Solvay chutait d'ailleurs de 2,01% à 43,23 euros vers 9h00 GMT.

Les plastiques de Solvay ont durement ressenti les difficultés de secteurs comme l'automobile et la construction, qui sont pour eux des débouchés importants. La hausse des coûts de l'énergie et des matières premières a aussi pesé sur les résultats dans la chimie.

La pharmacie de Solvay a en revanche brillé avec un chiffre d'affaires de 2,7 milliards d'euros l'an dernier, soit un peu plus d'un quart de celui de l'ensemble du groupe. Et elle lui a rapporté la moitié de son bénéfice d'exploitation, soit 509 millions d'euros.

Mais cela ne pèse pas bien lourd dans un secteur qui a connu ces dernières années une intense consolidation.

Sanofi-Aventis a enregistré en 2008 un chiffre d'affaires dix fois plus élevé que la division pharmacie de Solvay. Et le poids lourd né de la fusion des laboratoires américains Pfizer et Wyeth affiche un chiffre d'affaires combiné de 75 milliards de dollars.

La pharmacie de Solvay apporte en revanche de réels avantages à Abbott, connu surtout pour ses médicaments contre le sida et ses aliments pour bébés.

Elle va lui permettra notamment de se développer sur les marchés émergents d'Europe de l'Est et d'Asie, ainsi que dans les vaccins, et lui donne accès à plusieurs nouveaux médicaments contre l'hypertension et la maladie de Parkinson.

L'opération devrait être bouclée «au premier trimestre de 2010», sous réserve du feu vert des autorités de la concurrence concernées.

Solvay entend réinvestir les liquidités tirées de l'opération «en croissance externe et interne, avec un accent important sur la création de valeur à long terme», selon M. Jourquin.

Le groupe évoque des projets dans des régions à fort potentiel de croissance, de nouveaux produits à empreinte énergétique réduite.

Cette trésorerie pourrait toutefois attirer un potentiel prédateur, d'autant que sans sa pharmacie, le groupe belge ne pèse plus que 6,8 milliards d'euros de chiffre d'affaires et devient une cible plus facile.