Rogers (T.RCI.B) reverra de fond en comble son système de facturation en abolissant les «frais d'accès» honnis par bien des Canadiens. Mais en fin de compte, la facture mensuelle des clients sans-fil sera inchangée... voire plus élevée!

C'est ce qui ressort de l'annonce faite lundi soir par Rogers d'abandonner ses frais d'accès au réseau de 7,45$ par mois. Cette surcharge sera remplacée par des «frais de récupération des coûts gouvernementaux et réglementaires» d'environ 3$, et une hausse de 5$ pour tous les forfaits mensuels des nouveaux clients. Ces tarifs entreront en vigueur dans deux semaines.

Avec tous ces changements, un forfait qui coûtait 32,45$ reviendra à 32,58$, selon un exemple tiré d'un document interne obtenu par La Presse Affaires. La refonte du système de facturation de Rogers ne bénéficiera donc en rien aux consommateurs, même si elle élimine des frais controversés, avance Troy Crandall, analyste en télécoms chez MacDougall, MacDougall&MacTiers à Montréal.

«C'est d'abord et avant tout du marketing, car le prix des programmes n'a pas bougé, a dit M. Crandall. Ce qui compte, au bout du compte, c'est ce que le client paie chaque mois, peu importe comment on appelle tous ces frais.»

Selon plusieurs analystes, Rogers a décidé de simplifier sa facturation en prévision de l'arrivée de nouveaux fournisseurs sans fil d'ici quelques mois. Globalive, Public Mobile, DAVE Wireless et Vidéotron lanceront leur service dans divers marchés canadiens, et la plupart ont indiqué qu'ils ne factureraient aucuns frais d'accès au réseau.

Les marques à rabais Fido, Koodo, Virgin et Solo - qui appartiennent respectivement à Rogers, Telus et Bell - ont pour leur part déjà éliminé ces surcharges. Seuls Bell et Telus facturent encore de 7,70$ à 9,70$ pour accéder au réseau et au service d'urgence 911, ce qui enrage au plus haut point de nombreux Canadiens.

Rage et frustration

Le député libéral d'Ottawa-Sud, David McGuinty, milite depuis longtemps pour forcer les fournisseurs à faire preuve de plus de transparence. Il tente de faire adopter un projet de loi fédéral - le C-555 - qui leur interdirait de facturer des frais d'accès. Plus de 20 000 personnes ont déjà signé sa pétition en ligne.

«C'est indéfendable que ces frais n'aient jamais été justifiés, et c'est pourquoi je demande non seulement qu'ils soient bannis par le ministre de l'Industrie, mais aussi que le CRTC lance immédiatement une enquête pour voir ce qui se passe exactement avec ces frais», a indiqué le député pendant un entretien.

Quoi qu'il advienne, la plupart des analystes sont d'avis que ces frais d'accès disparaîtront - de nom, du moins - avec l'arrivée prochaine de nouveaux fournisseurs sans fil. D'ici un an au plus tard, selon Iain Grant, expert en télécommunications à la firme montréalaise Seaboard Group.

Telus a refusé de spéculer sur l'avenir de cette surcharge, hier. Chez Bell, la porte-parole, Claire Fiset, a indiqué l'entreprise allait «jeter un coup d'oeil là-dessus».

Rogers, pour sa part, indique qu'elle a revu sa méthode de facturation dans une optique de simplification et de transparence envers ses clients.

Les nouveaux «frais de récupération des coûts gouvernementaux et réglementaires» serviront notamment à payer les dépenses liées au 911 et à l'acquisition de spectre de fréquence sans fil, a indiqué la porte-parole, Carly Suppa, dans un courriel à La Presse Affaires. Il variera entre 2,46$ et 3,46$ selon la province, et coûtera environ 2,50$ au Québec.

La hausse mensuelle de 5$ pour tous les forfaits sera par ailleurs contrebalancée par l'ajout de trois nouveaux services - dont le transfert d'appel et l'affichage des appels manqués - qui ont une valeur totale de 11$, a fait valoir Mme Suppa.

Les clients existants ne paieront pas la surcharge de 5$, mais ils continueront de payer les 7,45$ chaque mois pour l'accès au réseau. Ceux qui le souhaitent pourront migrer vers un forfait plus cher, en échange de quoi ils cesseront de payer les frais d'accès.