Des paysans du nord de l'Inde, frappés par la sécheresse due aux très faibles pluies de mousson depuis des années, sont contraints de vendre leur femme pour rembourser les dettes contractées auprès d'usuriers locaux, s'alarment des groupes de travailleurs sociaux.

«Ils en sont là depuis un moment mais les gens hésitent à venir en parler», témoigne Manoj Kumar, un travailleur social de cette région âpre du Bundelkhand, coincée entre les Etats de l'Uttar Pradesh et de Madya Pradesh.

Souvent exclus du système bancaire traditionnel, les paysans accablés par les dettes se tournent la plupart du temps vers des prêteurs privés quand les banques leur refusent des prêts ou même des comptes à leur nom.

Mais cinq années successives de récoltes insuffisantes et une faible saison des pluies cet été ont conduit certains à des gestes désespérés.

De nombreux paysans obérés jusqu'à la ruine ont mis fin à leurs jours dans la région où des cas de trafic humain ont été également rapportés.

«Pour ces paysans endettés, vendre leur femme ou leur fille est devenu la solution de la dernière chance», confie un travailleur social sous le couvert de l'anonymat.

Selon les médias indiens, 500 paysans se sont suicidés en quatre ou cinq ans et environ 50% de la population a quitté le Bundelkhand pour chercher du travail en ville.

Il est difficile de savoir à quel prix et à qui les paysans vendent leur femme, mais selon des journaux locaux les épouses seraient vendues entre 1 et 12 000 roupies (240 dollars).

Certaines «transactions» sont faites sous couvert de mariages légaux, avec un contrat officiel, mais les travailleurs sociaux pensent que beaucoup d'épouses finissent dans des réseaux de prostitution.

Selon Ranjana Kumari, directrice du Centre de recherche sociale à New Delhi, les enquêtes montrent que le Bundelkhland est connu pour être l'une des régions les plus vulnérables à l'exploitation sexuelle. Selon elle, les paysans savent qu'ils vendent leur femme à des réseaux de prostitution mais «ils le font dans le désespoir le plus total».

Les faibles pluies en juillet et août ont endommagé les récoltes de riz, de canne à sucre et d'arachide de la région.

Environ 40% des districts du pays se sont déclarés en état de sécheresse et le département météorologique indien a indiqué dans un rapport publié en août que le pays souffrait d'un déficit pluviométrique annuel de 24%, et jusqu'à 35% dans certaines régions du nord-ouest.

Un porte-parole du département météorologique indien a toutefois indiqué jeudi dernier que de fortes pluies étaient attendues dans les jours à venir. Dans le Bengale occidental, des pluies torrentielles ont causé la mort cette semaine de 5 personnes et emporté des milliers de maisons.