Il n'y a pas que les ex-cadres de Cossette (T.KOS) qui sont intéressés à acquérir la firme de publicité. Certains de ceux qui sont actuellement en poste auraient aussi orchestré une contre-offre destinée à contrecarrer la prise de contrôle hostile lancée par Cosmos.

Selon une source de l'industrie de la publicité, un groupe de cadres dirigé par Brett Marchand, vice-président exécutif de Cossette à Toronto, a tenté de lever des fonds pour empêcher Cosmos de mettre la main sur la célèbre agence de publicité québécoise. «Un groupe de cadres a cherché à faire une contre-offre. Ils ont lancé une course frénétique auprès de fonds et de banques pour trouver l'argent nécessaire à faire contrepoids à l'offre de François Duffar», a expliqué cette source à La Presse Affaires.

François Duffar est l'ancien vice-président de Cossette qui dirige Cosmos, un fonds d'investissement créé spécialement pour mettre la main sur Cossette. Cosmos offre 4,95$ pour chaque action de Cossette, une offre qui attribue une valeur de 83 millions pour Cossette, excluant les dettes.

Cosmos a réussi à s'allier deux importants actionnaires de Cossette et contrôle désormais 37,3% des actions de l'entreprise.

La proposition a toutefois été qualifiée «d'opportuniste» et «d'inadéquate sur le plan financier» par Cossette. Question de faire grimper les enchères, l'entreprise a confié à BMO Marché des capitaux le mandat de solliciter d'autres offres.

Cossette et BMO ont refusé hier de dire si une contre-offre provenant de cadres de Cossette a bel et bien été orchestrée.

Marcel Barthe, vice-président, stratégie d'entreprise de Cossette, affirme toutefois qu'il est impossible que le président et chef de la direction de Cossette, Claude Lessard, participe actuellement à une telle contre-offre.

«M. Lessard a appuyé et entériné la décision du conseil d'administration de lancer un processus pour solliciter d'autres offres», a-t-il rappelé, expliquant que son rôle est de servir les actionnaires et qu'il serait bien mal vu de participer à un processus et de l'évaluer en même temps.

Il n'a cependant pas nié la possibilité que son collègue Brett Marchand ait, lui, lancé une contre-offre. «Nous n'avons pas d'information à ce sujet», s'est-il contenté de dire.

Ultimatum

C'est hier que prenait fin l'ultimatum de Cosmos, qui demande à Cossette de lui donner accès à ses livres afin d'évaluer sa situation financière. Au moment de mettre sous presse, Cossette n'avait toujours pas donné l'accès et ne pouvait dire si elle accepterait de le faire.

«Pour le moment, je n'ai pas de réponse là-dessus. C'est dans les mains du comité spécial et des conseillers légaux», a dit le vice-président de Cossette, Marcel Barthe.

Cosmos avait menacé de réévaluer son offre informelle et son intérêt à l'endroit de Cossette si l'ultimatum n'était pas respecté. Louis Hébert, expert en stratégie d'entreprise à HEC Montréal, rappelle que si c'était le cas, il faudrait aller chercher d'autres offres pour satisfaire les actionnaires.

«Les membres du conseil d'administration ont une responsabilité fiduciaire. Ils ne peuvent pas dire non à une offre attrayante sans raison justifiable. Sinon, des actionnaires pourraient poursuivre», rappelle-t-il.

Selon M. L'Allier, de BMO Marché des Capitaux le processus de sollicitation «génère un intérêt certain». Le marché s'attend en tout cas clairement à une contre-offre. Dans un marché en forte baisse, l'action de Cossette a gagné 9,7% ou 24 cents pour clôturer à 5,34$, soit bien au-dessus de l'offre de Cosmos.

Selon un acteur de la publicité au Québec, Cossette risque d'être cependant difficile à vendre dans le contexte actuel. La première entreprise de publicité au Canada est trop importante pour être facilement avalée par des concurrents locaux, mais risque de ne pas intéresser les grands internationaux de publicités établis à Londres, Paris, Chicago et New York.

«Cossette est à la fois trop grosse et trop petite», a commenté cette source.

Cossette a aussi perdu des plumes récemment lorsque des clients importants comme Bell, Molson et Le Groupe Pages Jaunes, ont choisi de partir.

Les acquisitions dans le monde de la publicité sont aussi compliquées par le phénomène des «comptes conflictuels». Une agence qui ferait la publicité de Toyota, par exemple, ne pourrait avaler Cossette parce que celle-ci est liée à GM, ou alors devrait se départir de ce client ou scinder ses activités en deux agences distinctes.