Des tabloïds britanniques du groupe Murdoch ont fait écouter des milliers de personnalités en toute illégalité avant de payer plus d'un million de livres (1,9 million CAN) pour tenter d'étouffer l'affaire, affirme jeudi le Guardian, dont les accusations provoquent un tollé en Grande-Bretagne.

News Group Newspapers, une société du magnat australien des médias Rupert Murdoch, aurait acheté le silence de trois victimes dont le téléphone aurait été mis sur écoutes, en leur versant de fortes sommes pour éviter des poursuites, selon le quotidien de centre-gauche.

News Group Newspapers est une subdivision de l'empire des médias News Corp, qui comprend l'hebdomadaire dominical News of the World et le quotidien The Sun, plus forts tirages au Royaume-Uni.

D'après le Guardian qui ne nomme pas ses sources, des reporters des deux titres auraient eu recours aux services de détectives privés pour pirater des téléphones et obtenir des informations confidentielles comme des déclarations fiscales ou des relevés bancaires.

Le mannequin Elle Macpherson, l'actrice Gwyneth Paltrow, le chanteur George Michael, l'ex-vice premier ministre John Prescott et l'agent des stars Max Clifford, feraient partie des victimes.

Face à la gravité des accusations, Paul Stephenson, le chef de Scotland Yard, a chargé son adjoint d'«établir les faits» et promis une déclaration dans la journée.

La commission des médias à la chambre des Communes a été convoquée d'urgence et le secrétaire d'État à l'Intérieur David Hanson devait faire une déclaration jeudi après-midi.

Interrogé depuis l'Italie où il participe au G8, le premier ministre Gordon Brown a pour sa part estimé que cette affaire «soulevait de nombreuses questions qui devront évidemment trouver des réponses».

Les pratiques dénoncées par le Guardian avaient déjà émergé quand Clive Goodman, le spécialiste de la famille royale de News of the World, avait été condamné à quatre mois de prison en 2007 pour avoir intercepté plus de 600 messages sur les portables des aides de membres de la famille royale, dont le prince William. Mais il avait à l'époque assumé seul la responsabilité de ces écoutes et News International, division britannique de News Corp, a toujours assuré n'avoir pas eu connaissance de ces pratiques.

Cependant, selon le Guardian, la police de Londres aurait eu connaissance d'allégations concernant le piratage de «milliers» de téléphones d'autres personnalités.

Le détective privé Glenn Mulcaire, également condamné à de la prison dans cette affaire, avait reconnu avoir piraté le téléphone de cinq autres personnalités dont Gordon Taylor, responsable de la Professional Footballers Association, le syndicat des footballeurs anglais, selon le journal.

Ce dernier avait alors engagé des poursuites, mais pour étouffer l'affaire, News Group aurait versé à ce responsable et à deux autres personnalités du football plus d'un million de livres, révèle le Guardian.

News International a jugé «inapproprié de faire des commentaires à ce stade», dans un communiqué transmis à l'AFP.

Ces révélations pourraient déboucher sur de nombreuses plaintes en justice de la part des victimes présumées d'écoutes, et mettre dans l'embarras un grand nombre de responsables.

Outre les journalistes et responsables éditoriaux du groupe Murdoch dont la responsabilité est encore à éclaircir, la police et la justice sont sur la sellette.

Plusieurs personnalités réclament aussi la démission d'Andy Coulson, ancien rédacteur en chef de News of the World devenu directeur de communication du leader de l'opposition, le conservateur David Cameron.