La crise économique et les coûteux plans de relance mis de l'avant pour la contrer promettent des lendemains difficiles aux contribuables de l'Union européenne.

Les Irlandais, qui ont profité pendant des années d'une croissance fulgurante avant de voir l'économie du «Tigre celtique» s'écraser, viennent de l'apprendre à leurs dépens. Et d'autres exemples pourraient suivre sous peu.

Le premier ministre irlandais Brian Cowen a présenté il y a quelques semaines un plan d'austérité qui n'épargne pratiquement personne.

Des augmentations d'impôt tous azimuts ciblant les classes aisées, mais aussi la classe moyenne, notamment à travers la hausse des taxes sur l'alcool, la cigarette, et l'essence, ont été introduites dans l'espoir de contenir le déficit public. Selon les dernières projections, il pourrait excéder 10% du PIB en 2009.

Les fonctionnaires, qui avaient manifesté en grand nombre dans les rues de Dublin en février, sont aussi touchés par le plan, présenté comme une étape incontournable par le gouvernement pour obtenir la relance espérée.

«Il nous faut d'abord stabiliser les finances publiques. Tant que nous ne pourrons pas nous remettre à flot, ceux qui ont investi chez nous et ceux qui pourraient investir à l'avenir ne nous feront pas confiance», a-t-il déclaré.

La Grande-Bretagne, qui est aussi aux prises avec une détérioration marquée des finances publiques, s'est engagée timidement sur une voie similaire dans son dernier budget en augmentant les impôts des contribuables qui gagnent plus de 150 000£ (280 000$) par année.

La plupart des analystes dénoncent comme trop optimistes les projections du ministre des Finances Alistair Darling et ont prévenu que le prochain gouvernement devra recourir à des coupes draconiennes.

Selon le Financial Times, ces coupes devraient toucher directement la rémunération des fonctionnaires et inclure des hausses d'impôts importantes.

M. Darling lui-même a fini par reconnaître que les dépenses publiques devraient être resserrées «plutôt sévèrement» dans un avenir rapproché.

Tant la Grande-Bretagne que l'Irlande font l'objet d'une procédure pour déficit excessif ouverte par la Commission européenne, qui a aussi dans le collimateur la Grèce, la France et l'Espagne. Les gouvernements de ces États doivent présenter au plus tard en octobre 2009 les mesures qu'ils entendent prendre pour rétablir l'équilibre.

L'initiative reflète la détérioration croissante des finances publiques des pays de l'Union européenne, qui sont durement touchés par la crise.

Le commissaire aux Affaires économiques, Joaquín Almunia, estime que la «consolidation budgétaire» est une condition nécessaire pour permettre une relance durable et qu'il serait par conséquent «désastreux» de laisser filer les déficits sans sévir.

Les semonces de la Commission européenne ont été très mal accueillies à Paris, où l'on martèle que «la priorité est au redémarrage des circuits de financement et à la relance de l'économie».

Le ministre du Budget, Éric Woerth, estime que l'attitude de l'organisation européenne est «un peu gonflée».

«Bruxelles nous dit d'un côté qu'il faut que les États européens combattent la crise en augmentant les dépenses publiques, puis de l'autre qu'il faut faire attention parce que nous allons dépasser les déficits qui étaient prévus», dit-il.

«Quand il y a un incendie, on ne chipote pas sur le montant de la facture d'eau», souligne, de manière plus imagée, le président de la Commission des finances du Sénat, Jean Althuis.

Le gouvernement ne se voit guère annoncer des mesures de restrictions alors que la tension sociale ne cesse d'augmenter et que les syndicats mobilisent leurs troupes pour obtenir une meilleure protection des emplois et du pouvoir d'achat.

L'ex-premier secrétaire du Parti socialiste, François Hollande, affirme que le «laxisme» du gouvernement vise d'abord et avant tout à protéger les «privilégiés» et ne pourra durer qu'un temps, ce qui rend incontournable une ponction fiscale accrue.

«Tout a une fin. Et la sortie de crise sera aussi douloureuse que la crise elle-même... La question majeure, politiquement, devient de savoir une nouvelle fois qui paiera! Ce serait un comble que les victimes d'aujourd'hui soient les contribuables de demain», souligne M. Hollande.