Malgré la récession, Google n'entend pas réduire ses investissements en recherche et développement, mais se montrera tout de même plus prudent, a indiqué mardi le chef de la direction financière de l'entreprise, Patrick Pichette.

Dans un discours fort couru prononcé à la tribune de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, M. Pichette a reconnu que le géant de l'internet souffrait de la crise.

«Personne n'est immunisé contre une récession, a-t-il déclaré aux journalistes après son allocution. Tout le monde est affecté par les récessions, Google aussi.»

Au premier trimestre de 2009, Google a enregistré la première chute de ses revenus depuis son entrée en bourse, en 2004. Les profits nets ont tout de même crû de 8 pour cent par rapport à la même période de l'an dernier pour se chiffrer à 1,42 milliard $ US (4,49 $ US par action).

«Google est incroyablement résilient parce que (son) modèle (d'affaires) s'adapte à l'économie», a soutenu l'ancien dirigeant de BCE.

L'entreprise voit la récession comme une occasion de se préparer pour la croissance à venir. Après tout, l'innovation technologique ne s'arrête jamais, même au coeur d'une récession.

«Nous continuons de financer l'ensemble de nos projets, a assuré Patrick Pichette. L'innovation est au coeur de Google. Ce que nous faisons actuellement, dans un monde rempli d'incertitudes, c'est d'être prudents là où nous le pouvons et où nous le devrions. Nous demandons simplement aux googlers (les employés de l'entreprise) d'être prudents. Ce n'est pas un endroit où vous arrivez avec une note de service en disant 'voici la nouvelle règle'. Google ne fonctionne pas comme ça.»

À titre de chef des finances, M. Pichette doit quand même exercer un certain contrôle. Les décisions d'investissement sont prises en équipe, en fonction de deux critères: la «différenciation technologique» et le potentiel d'un produit de «changer le monde», a-t-il expliqué.

Le Québécois n'a pas pu dire si Google projetait d'agrandir ses bureaux montréalais, où l'entreprise compte une poignée d'employés. Il a été impossible d'en connaître le nombre exact.

Au bureau à vélo

L'homme de 46 ans est visiblement comblé par son nouvel emploi qui, il faut bien le dire, le traite plutôt bien. Entré en fonctions en août dernier, Patrick Pichette a touché une rémunération totale de 3 millions $ US en 2008, ce qui comprend un salaire de 173 077 $ US, des primes en argent totalisant 1,7 million $ US, de même que des actions et des options d'achat d'actions.

«Il faut vraiment «fitter» dans la place, a-t-il raconté. Donc on a eu beaucoup de conversations à savoir «est-ce qu'on fitte ensemble?» Puis la même chose pour moi: la question, ce n'était pas 'est-ce que je suis capable de faire la job', la question, c'était: 'on va-tu avoir du fun?' Et puis là, regarde: je suis en 'bicycle à pédales' tous les jours, je siffle en rentrant au bureau. On a de vrais gros problèmes de marché: juteux, complexes et technologiques. C'est tellement le fun de travailler avec cette gang-là. Quel beau fit

Maintenant qu'il ne travaille plus pour BCE, le dirigeant jouit en outre d'une plus grande liberté vestimentaire: pour son discours de mardi, il s'est présenté en jeans et en souliers de course, portant un veston mais pas de cravate, un sac à dos orange au dos.

«Tu n'as pas besoin d'avoir un complet pour être pris au sérieux, tu n'as pas besoin d'être à ton bureau pour répondre à une question, a-t-il énuméré. Toutes ces idées-là et cette innovation-là font maintenant partie du tissu de la compagnie.»

Devant son auditoire montréalais, M. Pichette n'a pu s'empêcher de vanter les services de Google: la publicité en ligne, l'hébergement de données à distance (cloud computing) et le système d'exploitation Android pour téléphones cellulaires, dont il ne connaît toutefois pas la date de lancement au Canada.

«On s'en va dans un monde où tu te dis «pourquoi avoir un ordinateur quand tu as un téléphone cellulaire?'« a-t-il lancé.

Le dirigeant s'est par ailleurs porté à la défense de Street View, une fonctionnalité de Google Maps qui permet de visualiser sur une carte les quartiers et les rues des grandes villes du monde, grâce à des photos prises par des véhicules spécialement équipés. Le service, qui doit être lancé au pays plus tard cette année, inquiète le Commissariat à la protection de la vie privée du Canada.

«Dans la majorité des endroits où nous nous pointons, les gens sont impatients de voir la voiture Google (qui prend les images)», a affirmé Patrick Pichette, en soulignant que les visages non seulement des humains, mais aussi des animaux, étaient brouillés, afin de protéger la confidentialité.

Plus tôt ce mois-ci, des résidants de Milton Keynes, au Royaume-Uni, ont néanmoins protesté contre le passage d'une voiture de Google Street View dans leur ville.