Les employeurs privés ont continué à supprimer massivement des emplois aux États-Unis en mars et les chiffres officiels attendus vendredi devraient faire apparaître un nouveau bond du chômage, déjà au plus haut depuis 25 ans.

Selon l'enquête mensuelle du cabinet de conseil en ressources humaines ADP publiée mercredi, le secteur privé américain a détruit 742 000 emplois en mars, ce qui est bien pire que le scénario prévu par les analystes. Ceux-ci attendaient 663 000 suppressions nettes de postes.ADP a de surcroît révisé en hausse son estimation des pertes du mois précédent à 706 000, au lieu des 697 000 annoncées initialement.

Le rapport officiel sur l'emploi, qui prend aussi en compte le secteur public, «sera horrible: les entreprises licencient sans ménagement à mesure que l'économie dérape», estime Ryan Sweet, économiste de Moody's Economy.com

«Nous prévoyons que la récession finira à la fin de l'année, mais puisque le chômage est un indicateur traduisant avec retard la conjoncture, les pertes d'emplois continueront jusqu'en 2010, et il semble qu'on n'évitera pas un taux de chômage à deux chiffres», ajoute-t-il.

Selon ADP, le secteur des services, qui assure près de 85% de l'emploi non agricole aux États-Unis, a perdu 415 000 postes en mars, après 368 000 en février.

Avec une main-d'oeuvre en baisse continue depuis plus de deux ans, l'industrie a encore perdu 327 000 emplois, après les 338 000 de février.

Les grandes entreprises, comptant 500 salariés ou plus, ont supprimé 128 000 emplois, les entreprises moyennes (de 50 à 499 salariés) 330 000, et les petites 284 000. Les PME sont normalement le moteur de la création d'emplois aux États-Unis.

«Le recul prononcé de l'emploi au sein des petites et moyennes entreprises indique que la récession continue de s'étendre au-delà du secteur de l'industrie et des activités liées au logement pour gagner presque tous les secteurs de l'économie», écrit ADP.

Les chiffres de cette enquête sont «très décevants mais ne sont pas une grande surprise. On se demandait si l'inflexion récente de certaines statistiques (ventes de détail, production industrielle, commandes de biens durables, ventes de logements) serait suffisante pour ralentir les destructions d'emplois pour un temps: la réponse est non», estime Ian Shepherdson, économiste de l'institut HFE.

M. Shepherdson, table désormais sur 750 000 suppressions d'emplois en mars (au lieu de 700 000), et Elsa Dargent, de Natixis, reconnaît que sa prévision de 660 000 pertes nettes d'emplois en mars risque bien d'être dépassée.

Le taux de chômage aux États-Unis a atteint 8,1% en février, son plus haut niveau depuis un quart de siècle. Les analystes envisagent qu'il bondira à 8,5% en mars, soit son niveau de novembre 1983.

Pour l'instant, la Réserve fédérale américaine (Fed) table sur un taux de chômage compris entre 8,5% et 8,8% en 2009, et entre 8,0% et 8,3% en 2010.

Une nouvelle plus encourageante sur le front de l'emploi est venue du cabinet Challenger, Gray & Christmas. Dans une étude publiée mercredi, il relève que les entreprises américaines ont annoncé en mars leur intention de supprimer 150 411 emplois (aux États-Unis et à l'étranger), soit 19,3% de moins que le mois précédent.

Le niveau des suppressions d'emplois annoncées est ainsi revenu au plus bas depuis octobre 2008.